Champs de bataille – L’édito de Christophe Bonnefoy
Le marché était clair : à partir du moment où le projet était abandonné, il n’y avait plus aucune raison de faire de Notre-Dame-des-Landes un no man’s land, laissé à ceux qui avaient justement investi les lieux pour s’opposer au futur aéroport. Au jour J, les terrains occupés, sauf projets agricoles discutés et validés, devaient être évacués. Pour autant, il aurait fallu être bien naïf pour imaginer que les quelques zadistes les plus radicaux allaient porter leur baluchon à l’épaule et repartir d’où ils étaient venus, sourire en prime. C’est plutôt, pour certains, le pavé à la main qu’ils avaient décidé d’accueillir les 2 500 gendarmes dépêchés sur place.
C’était d’ailleurs là toute la difficulté pour Edouard Philippe : montrer les muscles sans avoir à s’en servir ; faire appliquer les décisions prises, sans risquer le dérapage. Et rendre à Dame Nature sa quiétude, surtout sans endosser le rôle du méchant oppresseur. Sauf que… par définition, un irréductible est prêt à tout pour défendre ce qu’il considère être son bon droit, même s’il est en dehors des clous.
Les forces de l’ordre réussiront à nettoyer la zone et à détruire les habitations illégales qui y ont été implantées, mais quid de la suite ? Le gouvernement ne pourra pas éternellement faire poster des escadrons entiers de gendarmes dans ce petit coin de Gaule. On peut imaginer que dans quelques jours, quelques semaines ou quelques mois, une minorité de zadistes aura toujours en tête de faire de ce symbole un Larzac moderne. Bien sûr sans passer par la case Etat de droit.
Une attitude vouée à l’échec. Forcément. Car entre ceux – une centaine – qui se doivent de respecter la loi et ceux – plusieurs milliers – qui sont là pour la faire appliquer, les jeux sont faits d’avance.