Casse-tête – L’édito de Christophe Bonnefoy
Le projet de loi sur l’immigration n’est pas le moins important de ce quinquennat. Pas le moins clivant, non plus. Et en tout état de cause, pas le plus simple à aborder, pour le gouvernement.
Pas étonnant alors, qu’avant même le lancement des débats, d’abord ce lundi au Sénat puis à l’Assemblée à la fin du mois, personne ne sache réellement à quelle sauce va être mangé le texte, y compris ceux qui en ont posé les fondements. Ce projet cristallise tellement de tensions qu’on a rarement autant été dans le « en même temps », marque de fabrique, presque, d’Emmanuel Macron. Etre en même temps « gentil avec les gentils et dur avec les méchants », voilà l’idée directrice résumée par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Ça veut tout dire… et pas grand-chose à la fois.
Ou plutôt, cette simple phrase donne le ton des grands écarts que la majorité va devoir faire pour grappiller, ici et là, les suffrages nécessaires à l’adoption finale. Une sorte de bricolage pour certains, ou au contraire une prise en compte très pragmatique des réalités de la société, pour d’autres.
A un bout du spectre par exemple, la création d’une carte de séjour pour les métiers en tension. A l’autre extrémité, des expulsions facilitées pour les étrangers « ne respectant pas les valeurs de la République ». Les deux idées se rejoignent, quelque part. Mais résument les deux pendants du texte, entre intégration et répression. Inutile de dire que ceux qui adhéreront à l’idée de jouer la carte de l’intégration tireront à boulets rouges sur le volet répressif. Et vice versa. Avec le risque qu’au bout du compte, personne ne se satisfasse de rien.
Plusieurs fois reportée, l’étude du texte doit en outre composer avec une nouvelle donne : un climat délétère, indirectement inspiré par la situation du côté d’Israël et les récents attentats sur notre sol.
Le gouvernement va devoir marcher sur des œufs, à la fois pour espérer un consensus et pour ne pas jeter de l’huile sur un feu déjà vif.