Capitalisme et mondialisation : « c’est très violent à l’échelle humaine »
« Ça fait très longtemps que je dis que la politique est à bout de souffle, l’abstention en témoigne. Dans un de mes livres, j’explique qu’à partir des années 90, il y a un changement politique majeur avec la financiarisation de la société. Aujourd’hui, il n’y a plus de politique au sens d’Aristote, mais une politique guidée par l’économie », constate André Bellon, président de l’association « Pour une constituante ».
Le maire de Joinville, Bertrand Ollivier, le rejoint sur ce point. « Le monde capitaliste, c’est être le plus performant. Ça n’existait pas dans les années 70. Il y avait alors de la place pour tout le monde. Aujourd’hui, tout ça a été cassé. On se retrouve avec des gens qui sont déclassés malgré leur potentiel. C’est très violent à l’échelle humaine […] On a loupé un grand rendez-vous de société dans les années 90. On le paie aujourd’hui. Petit à petit, on est partis sur des voies qui ne profitaient pas à tout le monde. Le capitalisme nous tente avec des tonnes de pubs, mais il faut de l’argent pour payer du rêve. Il y en a qui y arrive, mais pas tous. On a alimenté une lutte des classes, avec les très riches, les moyens et ceux qui ne finissent pas la fin du mois. »
Gilles Desnouveaux, le maire de Reynel, observe également une perte de considération pour l’Homme au profit de l’économie. « Dans la politique actuelle, l’humain ne compte plus. Je suis dégouté quand j’entends parler d’impératif de bénéfice sur le service public. Il n’y a pas d’argent pour l’hôpital ou pour l’école. Des gens touchent une retraite à 500 €, d’autres un RSA à 650 €, et, à côté, il y a des gens comme le PDG de Total qu’on devrait plaindre pour un salaire à 500 000 €. Les plus pauvres s’appauvrissent et les élites s’enrichissent. Il y a deux France, celle qui se gave et celle qui subit. C’est ça qui heurte les gens. »
Il poursuit : « On parle de Lactalis et des éleveurs quand il est question du prix du lait, mais on ne parle jamais des actionnaires et de ce qu’ils vont faire. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ne mettent pas la main à la poche. Même pendant la Covid, les fortunes des millionnaires et milliardaires ont augmenté ».
Malgré tout, pour André Bellon, la situation reste réversible. « La mondialisation n’est pas un changement de nature de l’Homme, mais une création humaine conduit par des intérêts humains. »