Cap inchangé – L’édito de Patrice Chabanet
Le navire a changé de nom, mais il garde le même cap. Le Front national s’appellera désormais Rassemblement national, mais sa colonne vertébrale idéologique reste identique. Hormis le changement de dénomination de son parti, Marine Le Pen s’en est tenue, hier à Lille, aux fondamentaux d’un discours qu’elle avait rodé pendant la campagne présidentielle mais qui avait implosé face à Emmanuel Macron. Elle a réaffirmé, en la durcissant, son opposition à l’immigration, qu’elle soit légale ou non, et à l’Union européenne. Son réquisitoire contre le chef de l’Etat est demeuré implacable. Une posture tactique évidente pour apparaître comme la principale opposante au locataire de l’Elysée. Mais, ce faisant, elle a pris le risque de se positionner par rapport à lui, plus que par rapport à elle-même, ce qui réduit l’ambition affichée d’une véritable refondation. L’heure n’est plus à la campagne électorale, mais à la construction d’une thématique de reconquête. Or, une fois de plus, Marine Le Pen ne s’est pas aventurée sur le terrain économique. Quelle position sur l’euro ? Quelle politique industrielle pour la France ? Quels objectifs chiffrés en matière de croissance, de déficit public ou d’emploi ? Par quoi remplacer la Politique agricole commune ? Autant de questions sans réponses. On sent déjà là l’absence d’un Philippot plus rompu à l’exercice macroéconomique.
La rénovation du parti devra passer aussi par un sérieux nettoyage des comportements racistes. Depuis qu’elle est aux manettes, il faut le reconnaître, Marine Le Pen a sévi contre certaines pratiques. Il n’empêche, les propos de son assistant parlementaire contre un vigile, traité de « nègre de merde » font plutôt désordre, c’est le moins qu’on puisse dire. Certes, l’intéressé a été suspendu « à titre conservatoire ». Mais le mal est fait. Il fait apparaître des pulsions d’exclusion qui ne riment pas avec rassemblement.