Bruits de bottes – L’édito de Patrice Chabanet
Coup de chaud dans les relations entre Moscou et Kiev, après l’arraisonnement de trois bateaux de guerre ukrainiens par les Russes, à l’entrée de la mer d’Azov. Un épisode de plus dans le contentieux qui oppose les deux pays. L’aide fournie par la Russie aux séparatistes du Donbass et l’annexion de la Crimée ont consacré leur divorce. L’incident maritime ne fait donc qu’alimenter une confrontation rampante. Les deux camps, pour le moment, jouent à fond la carte de la dramatisation. Les Russes massent des troupes et du matériel à la frontière et le président ukrainien a instauré la loi martiale. Pour couronner le tout, Donald Trump menace d’annuler sa rencontre avec Vladimir Poutine, à la fin de la semaine en marge du G20 en Argentine.
Dans le contexte de crispation qui caractérise actuellement les relations internationales, ces bruits de bottes sont inquiétants. Fort heureusement, on est encore loin d’un conflit généralisé, comme le proclame le président ukrainien, Petro Porochenko. Ce dernier est en mauvaise posture avant la présidentielle du printemps prochain. Or, c’est bien connu, pour se refaire une santé sur le plan interne, il est toujours bon d’agiter le spectre des périls extérieurs. Pour autant, le Kremlin n’est pas blanc comme neige. L’arraisonnement de trois bateaux et l’emprisonnement de leurs équipages constituent une agression caractérisée. Mais, dans sa froideur de calculateur, Poutine n’a pas l’intention de se lancer à la conquête de l’Ukraine, ancienne république soviétique. Il veut « juste » consolider la conquête de la Crimée, acceptée de facto par la communauté internationale.
Il n’en demeure pas moins vrai que le risque d’un conflit ne doit pas être écarté d’un revers de main. La situation reste globalement explosive. Les russophones de l’Est ukrainien peuvent rallumer le feu, comme les nationalistes ukrainiens pourraient être tentés par une fuite en avant, convaincus que l’allié américain viendra à leur rescousse. Des engrenages qu’on espère ne pas voir se mettre en marche.
Publié le 29 novembre 2018