Benoît Campargue : « J’ai tenu ma promesse »
Chaussures dorées, cravate dorée… Vous aviez mis la tenue de circonstance. Le titre ne pouvait pas échapper à Teddy Riner, alors ?
Benoît Campargue : « Si on n’y croit pas, ça ne sert à rien de venir. J’étais optimiste. Mais je n’ai cessé de répéter à Teddy qu’il ne devait pas être champion olympique avant l’heure. Les médias, l’opinion publique le voyaient déjà sacré depuis un moment. Nous, on a tracé ce suc-cès pas à pas, combat après combat. »
Teddy est venu vous embrasser les pieds à l’issue de sa finale…
B. C. : « C’était spontané ! J’ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec lui. Il y a eu des moments très difficiles, mais j’ai tenu ma promesse. J’avais dit à ses parents que j’en ferais un champion olympique. Cette réussite, c’est un travail d’équipe. Mais le meilleur entraîneur, c’est l’athlète. »
L’avenir de Teddy, maintenant, c’est quoi ?
B. C. : « D’abord ce sont des vacances. De longues vacances. Il a besoin de se ressourcer, de prendre du recul après un aussi gros résultat. Il est tout de même à pied d’œuvre depuis 18 ans. »
Il a désormais tout gagné. Peut-il s’arrêter ?
B. C. : « Non ! Teddy ne tient pas en place, vous le savez bien. Il aime trop le judo. Il ne va pas arrêter sa carrière. Maintenant, il va laisser passer du temps et faire le point sur la direction où il veut aller, les objectifs qu’il souhaite se fixer. Quand on est un champion, on est boulimique. Au départ, on veut des médailles. Et puis quand on les a, on cherche les records de médailles. »
« Les Jeux, c’est marche ou crève »
Les échecs de Pékin et Tokyo sont-ils effacés ?
B. C. : « Ces deux échecs l’ont marqué au fer rouge. Il a été très compliqué de le remettre en selle après ça. Mais j’ai la conviction que la défaite contre Kumikata (aux Jeux 2008) lui a servi et que, s’il en est là, c’est aussi grâce à ça. »
Quel était le plan aujourd’hui (hier) ?
B. C. : « Il fallait surtout se montrer prudent. Prendre chaque combat un par un. On n’était pas là pour faire le spectacle, ni pour mettre un “pion” (ippon). On a misé sur l’efficacité avant tout. »
Teddy Riner était-il stressé ?
B. C. : « S’il n’y a pas de stress, il n’y a pas de projet. Avec la pression qu’il avait ces derniers mois, je trouve qu’il a bien géré la situation. Etrangement, ce matin, il a été capable de se détendre. C’est ça la marque des champions, pouvoir passer de la détente à la concentration extrême en un instant. »
C’était votre dernier combat comme entraîneur de l’équipe de France. Que ressentez-vous ?
B. C. : « Tout n’a pas toujours été facile, mais de mon point de vue, l’ensemble des préparations des athlètes ont été bien accueil-lies par eux. Les premiers mois de cette olympiade, ils avaient de l’appréhension. Ils voulaient savoir à quelle sauce ils allaient être mangés. Ensuite, j’ai senti que tout le monde suivait. J’ai eu un bon groupe, détendu, mais pas trop, parce que sinon, ça veut dire que tu te satisfait de ce qui est fait. Or il faut sans cesse repousser les limites et se sur-passer. Les Jeux, ce n’est pas de l’affectif. C’est marche ou crève. Maintenant, je vais moi aussi me reposer, partir en vacances. Je suis fatigué. Et je suis sur le marché. »
Quel bilan tirez-vous de ces Jeux ?
B. C. : « On a fait de bons Jeux. J’aurais juste aimé une autre médaille d’or. J’ai surtout un gros regret concernant Alain Schmitt (en moins de 81 kg). Il passe à côté d’une médaille. Quand je vois les efforts qu’il a faits, son travail, ses progrès, j’ai vraiment mal au cœur pour lui. »
Propos recueillis par D. C.