Rencontre d’écrivain : Belinda Cannone et “Les vulnérables”
De nombreux amoureux de la littérature s’étaient donné rendez-vous jeudi 4 avril, à la librairie Apostrophe à Chaumont, pour voir et entendre Belinda Cannone, romancière et essayiste, présenter son dernier ouvrage “Les vulnérables”. Face à elle, Sarah Polacci menait l’interview avec son professionnalisme habituel, sa rigueur souriante, son ouverture aux propos de chacun.
Très détendue, très naturelle, Bélinda se sentait chez elle. Car cette grande écrivaine est loin d’être une inconnue dans la ville : elle fut la première présidente du prix du Salon du livre de Chaumont en 2012 : « J’ai participé, souligne-t-elle avec humour, à inventer le prix du Salon », si bien que ces retrouvailles ont donné de suite à la soirée un climat de familiarité joyeuse.
Mais qui sont les vulnérables auxquels elle consacre neuf nouvelles ? Des enfants abandonnés comme ceux de Barbès qui vivent de rapines et de larcins, des jeunes gens fugueurs, des migrants, des SDF, « tous ceux qu’on voit un peu moins que les autres, ceux qui n’ont pas la parole, qui peinent à trouver leur place ». Ceux aussi qui sont désarmés par la violence de notre monde, comme elle… Mais elle se reconnaît également un profond désir de vivre et d’aimer, elle aime la danse, les randonnées, la nature. Chacune de ses nouvelles est traversée de ciels, d’oiseaux et de nuages et toutes ont pour fil conducteur la liberté, « la valeur centrale qui conditionne ma pensée ».
Les jeunes en colère
Elle est préoccupée du sort des jeunes d’aujourd’hui qui refusent le monde qu’on leur laisse, « font des choix différents de leurs parents et remettent en question leurs choix de vie », refusant souvent le débat et provoquant l’angoisse des parents qui sont dans l’incapacité de les aider. A cela, elle oppose la chance qu’elle a eue d’avoir un père exceptionnel qui l’a incitée à écrire et a pu lui transmettre ses valeurs « belles et bonnes ».
La nouvelle est un genre qui lui « plait » qui lui « convient » bien qu’il ne soit plus de mode actuellement. C’est un genre qui lui permet de peaufiner l’écriture et elle cite en exemple la dernière nouvelle, qu’elle a écrite comme de la musique : « Elle ressemble à une mélopée et c’est possible parce qu’elle est très courte ». De plus, ajoute-t-elle, c’est un genre elliptique et le lecteur, ce lecteur qu’elle interpelle dans ses récits, doit chercher, imaginer, participer à une partie du travail.
« L’écriture, dit Belinda Calonne, me permet d’aborder le réel, de montrer le monde comme il va, de transmettre mes croyances, de peser du bon côté de la force, peut-être que j’aide un peu à l’équilibre du monde ». Sarah Polacci compare cela joliment à l’art japonais du Kintsugi, l’art de réparer des objets avec de l’or, de montrer les fêlures en les réparant, « rendant ainsi les choses encore plus belles qu’avant ».
De notre correspondante Françoise Ramillon