Aux prémices de la Shal
DRÔLES D’HISTOIRES (3). Langres, cité plus de deux fois millénaire, fourmille, au fil des siècles de sa légende, d’Histoire… et d’histoires. Où les faits les plus étonnants côtoient les plus graves… comme les plus drolatiques. Aujourd’hui, les débuts des sociétés érudites et du musée de Langres.
Longtemps considéré comme ayant eu un rôle mineur dans l’instauration de la Société archéologique langroise (SAL) devenu par la suite Shal (Société historique et archéologique langroise), le maire de Langres de 1831 à 1842, puis de 1843 à 1847, Jean-Baptiste Aubert a vu sa place dans ce volet de l’histoire langroise être réhaussée suite à l’étude de nouvelles archives provenant de sources très variées.
Celui qui a été à la fois élu et président de la SAL a contribué à débloquer une situation qui voyait des membres du conseil être rétifs à la création d’un musée dans l’abside de l’église Saint-Didier. C’est ainsi que, dès 1828, Girault de Prangey effectue des moulages de bas-reliefs antiques et réalise, en 1832, en accord avec le maire Aubert, un premier démembrement des objets d’antiquités dont la plupart étaient engagés dans les murs d’enceinte de la ville. Des remparts pour lesquels l’édile langrois a fait introduire dans l’acte de vente de ceux-ci au gouvernement une clause permettant que « les objets d’antiquité soient retirés avec précaution et mis en ordre ».
Jean-Baptiste Aubert propose ensuite à son conseil municipal la nomination d’une commission chargée de surveiller le transport et le placement dans un même local des objets d’art à conserver. Il s’agit alors du premier document évoquant la constitution d’un musée. Au-delà de la conservation d’objets, la commission aura aussi la charge de rechercher les dates et destinations des pierres et fragments de monuments recueillis et de s’occuper d’un travail historique sur la ville.
Un maire doublement impliqué
Après une proposition en 1834 par Luquet d’implanter les antiquités dans un local ouvert à l’arrière de l’hôtel de Ville, le projet de musée approche de sa concrétisation en 1836 lorsque le maire Aubert crée la SAL et autorise seul en juin 1838 la société à déposer des collections dans la chapelle. Dans le mois suivant, des blocs antiques investissent les lieux de manière à ne plus pouvoir être délogés. S’engagent alors des travaux de restauration de la voûte de l’église qui permettent au printemps 1841 d’offrir au bâtiment différents usages à savoir un musée et une école de dessin.
A la lecture des archives disponibles, il convient de comprendre que la création du musée de Langres n’est pas le fruit d’initiatives individuelles d’archéologues langrois coordonnées par une société érudite mais un projet voulu par le maire Jean-Baptiste Aubert et achevé avec opiniâtreté en dépit des obstacles. Jouant de sa double fonction de maire et de président de droit d’une société qu’il a fait créer, l’édile a donné l’impulsion à un projet pour lequel pendant longtemps il a été mis au second plan au profit de Girault de Prangey ou Luquet.
Pierre Gaudiot
p.gaudiot@jhm.fr