Atterrissage d’urgence – L’édito de Patrice Chabanet
Toute la filière aéronautique est en train de plonger. C’était prévisible, avec des enchaînements implacables. Sur toute la planète, des milliers d’avions ont été cloués au sol en raison de la crise sanitaire. Un choc violent pour les compagnies aériennes privées de leur clientèle. Sur le plan social, ce sont des milliers d’emplois qui vont passer à la trappe. Ainsi Air France a annoncé la suppression de 10000 postes. Moins de passagers, des compagnies en difficulté financière, c’est mécaniquement moins d’appareils à fabriquer et des commandes annulées. C’est le cas d’Airbus qui s’apprête lui aussi à couper dans ses effectifs : 15000 postes supprimés, dont 5000 en France.
La crise que traverse l’aviation civile n’est pas un incident de parcours qui serait absorbé par la reprise. Elle surfait sur un marché mondial en pleine expansion. Des tarifs de plus en plus attractifs ne cessaient de séduire de nouvelles couches sociales. La crise sanitaire est venue chambouler toute cette logique de croissance régulière.
Les défis qui sont lancés désormais aux compagnies et aux constructeurs doivent être relevés sur deux échelles de temps. Le premier, à court terme, est de faire repartir la machine, sachant que les petites compagnies low-cost n’ont pas la puissance financière, malgré les aides de l’Etat, pour redécoller. Le deuxième, à moyen et à long terme, est plus ample. Il s’agit de penser autrement le transport aérien en l’inscrivant dans une logique de transition écologique. Pêle-mêle : suppression des petites lignes intérieures, fabrication de moteurs moins gourmands, utilisation de matériaux composites. La concurrence exacerbée par la contraction du marché promet une crise économique sévère, notamment en France où l’aéronautique constitue un pôle d’excellence. On mesure l’impact social de ce qui se prépare. Des milliers de suppressions d’emplois, bien sûr. Mais aussi un traumatisme pour l’ensemble des salariés qui, il y a moins d’un an, voyaient les commandes s’accumuler et qui, aujourd’hui, doivent subir un atterrissage d’urgence.