Amis ennemis – L’édito de Christophe Bonnefoy
L’amitié, ça n’existe pas. En tout cas lorsque sont posés sur la table des milliards de dollars (américains ou australiens) ou d’euros. En l’occurrence, celle qui aurait dû évoluer vers un mariage d’amour entre notre beau pays et la non moins magnifique île d’Océanie n’aura été que de façade. Je t’aime, moi non plus. Je t’aime, mais je te fais un enfant dans le dos, comme on dit presque vulgairement. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves le Drian, appelle cela un coup. Dans le dos toujours.
La vente de douze sous-marins à Canberra était scellée. Le contrat était signé, pour un montant de 56 milliards d’euros. Mais la mariée était trop belle. Plus précisément, elle est partie avec un autre, avant même de prononcer le oui définitif.
Bien évidemment, économiquement parlant, les chantiers navals français, en plus d’afficher leur colère, montrent leur peine. En terme de diplomatie, c’est peut-être encore plus embêtant. La France se fâche ici avec les Etats-Unis, qui viennent de récupérer le marché. Bonjour l’amitié… Mais de manière plus large, c’est une région entière qui risque de connaître quelques instabilités, avec ce revirement. Pour faire simple, les Chinois sont vent debout. On sait qu’ils ne sont pas vraiment amis avec les Américains. On sait aussi qu’ils sont en bisbille avec l’Australie. Et que l’influence dans cette zone indo-pacifique est un enjeu majeur. La nouvelle alliance entre Washington et Canberra (mais aussi Londres) le prouve.
A l’évidence, les sous-marins nucléaires américains – ceux de la France étaient conventionnels – n’ont pas fini de faire des vagues.