Amis de Buxières : Michel Sarrey cultive la ruralité
Quarante ans durant, Michel Sarrey, pédagogue dans l’âme, s’est investi au sein de l’Institut Rural de Buxières-lès-Villiers, petit village où il ne compte que des amis : Les amis de Buxières.
Chassigny, années 50. Le village étant à la jonction des trois provinces, Franche-Comté, Champagne et Bourgogne… Michel grandit dans l’ambiance multiculturelle singulière des carrefours.
En 1956, Michel, 10 ans, entre au cours de fin d’études à la grande Ecole. Son instituteur propose qu’il rejoigne le collège à Langres, mais le grand-père fait barrage : « Il doit être paysan, il n’ira pas au collège ». Michel va donc passer quatre années dans le même cours, quatre années d’échappées belles dans la nature : « Des sources d’eau pure pour se rafraîchir pendant la fenaison ; l’air peu chargé en particules fines ; la terre nourrie par de la matière organique et habitée par des lombrics… Je m’émerveille de la vie dans tous ses états. »
En 1960, Michel, diplômé du Certificat d’Études Primaires, entre à la Maison familiale rurale de Saint-Broingt-le-Bois. La formation par alternance convient parfaitement au fils de paysan avide de transformer ses observations en sujets d’études. Cette formation sera complétée, plus tard, par un Diplôme Universitaire des Sciences de l’Education (DUSE) obtenu en formation continue avec l’Université de Clermont-Ferrand.
Fin 1968, Michel intègre l’équipe éducative de l’Institut Rural de Buxières-lès-Villiers. Il y restera plus de 40 ans, en tant que moniteur durant 4 ans puis directeur : « Le coup de cœur au départ pour l’accompagnement de jeunes chefs d’exploitation de huit départements va être suivi de beaucoup d’autres. A l’enseignement rigide des matières, je préfère appréhender le niveau de mes élèves et leur personnalité de manière globale. D’ailleurs, dans la Grèce antique, le pédagogue était celui qui accompagnait l’élève sur le chemin de l’école. »
Michel a ainsi accompagné chacun de ses élèves qu’il suit dans leur parcours de vie : « Monique est arrivée à 16 ans, en disant bien qu’elle n’aimait pas l’école. Et pourtant, après deux années de pratique de l’alternance à l’Institut Rural et un emploi en hôtellerie, elle se présente chez Maxim’s où elle devient première chef de rang. »
Histoire, culture et ruralité
Les Amis de Buxières naissent dans l’esprit de Michel Sarrey lors des vacances en famille : « Notre petit village a conservé la connaissance des us et coutumes du siècle dernier mais les pratiques disparaissent. Il nous faut les montrer aux urbains et aux jeunes générations. Je crois au passé comme base de la préparation de notre avenir. Je crois au vivre ensemble et au projet commun. »
En 1980. Buxiérois et Buxiéroises relèvent les manches et reconstituent un mariage d’époque 1900 : les futurs mariés, le maire, le curé, les servants de chœur, le cortège, la course au gâteau, les danses, le repas de mariage. 134 acteurs costumés par les collectes dans les greniers haut-marnais et par une couturière de talent, son épouse, Raymonde.
Mille huit-cents spectateurs pour une première… Les Amis de Buxières y retournent avec, chaque année, la mise en scène d’un nouveau thème. En 1984, le succès des fêtes paysannes est tel (10 000 spectateurs en une seule journée) que la joyeuse équipe s’oriente vers des spectacles « son et lumière » plus structurés.
Entre 1983 et 2016, une quarantaine de villages accueillent la troupe : « Créer un son et lumière et vivre une aventure dans la convivialité, et l’amitié, ce fut, pour nous, l’école de l’adaptation permanente. Un lieu différent chaque année… Il faut étudier le thème, souvent empreint d’histoire locale, écrire un scénario, réaliser une mise en scène, se mettre en immersion dans la communauté qui nous reçoit de façon à répondre à son attente et créer une ambiance festive. » Dans l’association, tout le monde est le bienvenu, et chacun a sa place. La troupe est un joyeux brassage de bonnes volontés venues de tous horizons, de tout âge.
Seule une pandémie pouvait enrayer la belle dynamique mais les Amis, jamais à court d’idées, s’adaptent : « Nous nous consacrons à la réalisation d’un film sur la vie riche, aventureuse, passionnante et passionnée de l’un de nos plus grands inventeurs français, né en 1731 à Roches-sur-Rognon : le marquis Jouffroy d’Abbans, l’inventeur de la navigation à vapeur. Une fois de plus, les Amis doivent s’adapter, innover, intégrer des techniques cinématographiques (story board, prises de vues, montage). » Le film sortira en 2022.
De notre correspondant Serge Borne