Aesculap : Columbus entre dans un nouveau monde
Ces dix dernières années, Aesculap Chaumont est passé de 12 000 à 50 000 prothèses de genoux. Il faudra en produire le double dans quatre ans ! Impossible ? Pas si sûr…. (Supplément entreprises du JHM – novembre 2015).
Pour la Haute-Marne, le « Columbus » est-il au genou ce que la « Corail » est à la hanche , l’élément déclencheur ? Pour comprendre la réussite chaumontaise d’Aesculap et envisager la révolution en gestation, il est éclairant de revenir en arrière. En 1993, Aesculap rachète tout ce qui est fabrication et développement du genou au sein de l’entreprise Landanger à Chaumont.
Formé dans l’automobile, connaissant parfaitement les règles de l’entreprise allemande et parfaitement bilingue, Claude Rauscher (photo ci-dessous) arrive en 2003 . Le site produit alors 12 000 implants par an. Cette année-là sortent les premiers Columbus, une nouvelle génération de prothèse du genou.
La stratégie mise en place alors s’avère des plus pertinentes : plutôt que de travailler sur une prothèse visiblement aboutie, Claude Rauscher oriente les forces du bureau d’études sur l’instrumentation. Non seulement l’outillage devient bien plus simple, bien moins cher, mais l’opération qui durait 90 minutes ne requiert plus désormais que 45 minutes d’occupation du bloc opératoire ! Les hommes en blanc peuvent dès lors opérer davantage pour moins cher. C’est la première révolution Aesculap. Elle déclenche en retour une augmentation quasi mécanique de la demande d’implants ; cela tombe bien : Aesculap produit alors un genou adapté à la morphologie européenne et américaine : le Columbus.
Depuis 2012, la fabrication des instruments de pose du genou progresse et a été multipliée par trois. Aesculap poursuit son effort dans l’instrumentation qui continue de nourrir la demande en genoux. En 2014, le site chaumontais augmente sa production du Columbus de 15%. Pour réjouissante qu’elle paraisse, cette croissance impose d’être maitrisée, anticipée. Le marché est impitoyable et saura naturellement se nourrir ailleurs si le staff chaumontais se contente de l’observer satisfait.
Dans le même temps, Aesculap se prépare à pénétrer l’Eldorado du médical: les Etats-Unis. Les homologations sont en cours avec la FDA, l’organisme d’état américain en charge des autorisations de mise sur le marché outre Atlantique. Un accord commercial est passé avec un puissant distributeur.
Observateur attentif, Claude Rauscher voit poindre la concurrence, notamment des pays “à bas coût”. Il force le destin et présente au groupe BBraun (55 000 personnes, 6 milliards de chiffre d’affaires) son audacieux projet : parier sur Chaumont. S’appuyant sur ses succès précédents, il convainc l’actionnaire. Car sans attendre, déjà, il avait réorganisé la production, agrandi les locaux. 2,2 millions d’euros ont ainsi été investis en 2014. BBraun est séduit. Un bâtiment de 1200 m² va sortir de terre, à la place de l’actuel parking. L’investissement représente 12 millions d’euros sur 5 ans. Le lancement de la production est envisagé pour fin 2016 avec une trentaine de créations d’emplois à la clé ! Il s’agit pour Aesculap Chaumont, de relever trois défis :
1) faire face à l’augmentation de la demande liée notamment à la pénétration programmée du marché nord-américain ; d’où les 100 000 genoux attendus d’ici 2019. C’est demain.
2) produire à des prix compétitifs pour maintenir la concurrence à distance.
3) anticiper l’après-Columbus. Le genou de demain est dans les tuyaux. Mis au point à Chaumont, il sortira vers 2018 ; chut !
En attendant, Aesculap a décliné son Columbus avec une version spéciale “grande taille” (ça sent les States) et une autre pour les Asiatiques qui sollicitent différemment leurs genoux.
Désormais rasséréné sur l’avenir, Claude Rauscher le confie volontiers : «Avec tous ces projets, nous entrons dans un nouveau monde».
Voir aussi : www.bbraun.fr