Abbaye de Mormant : bilan de santé pour la vieille dame
Sur proposition de l’association L’Abbaye de Mormant revivra, Aurore de Dinechin, architecte du patrimoine, a débuté son « bilan de santé » de l’édifice samedi 18 novembre. Elle est épaulée dans cette tâche par trois autres architectes de Rambouillet et Paris. Aurore de Dinechin a fait part de tristes constats mais aussi et surtout de bonnes nouvelles.
«Notre boulot, en docteurs du bâtiment, va consister à relever les maladies visibles, telles fissures, torsions des murs, défauts dans la charpente», détaille Aurore de Dinechin. «Mais surtout, deviner ce qui ne se voit pas. A l’aide d’un appareil de relevés 3D, une maquette de la structure va être réalisée révélant la géométrie exacte du bâtiment et ses eventuels mouvements. Il y aura aussi de la géotechnique. A partir des dessins et coupes obtenus, nous, architectes, pourront confronter nos analyses et dresser un premier bilan. Ensuite on hiérarchise, et on préconise en fonction» ajoute-t-elle.
Les plafonds voutés de l’extraordinaire salle basse de la Maison-Dieu sont soutenus par des étais depuis les années 1980. Des témoins en plâtre ont été posés dans les fissures en 2007. Aurore de Dinechin est enthousiaste : « La structure n’a quasiment pas bougé». Fragile mais toujours solide au vu des nombreuses transformations, parfois curieuses, qu’a connues le bâtiment au cours des siècles. La Maison-Dieu a été modifiée, agrandie, abaissée, puis ses sols remontés, sans compter les incendies. La charpente, remaniée, bricolée, a causé un effet domino sur les murs et les planchers. Peu à peu l’équipe d’architectes s’imprègne et découvre. Les chaud-froid ont causé de nombreuses fissures. L’incroyable fresque du XVe siècle pillée en 2016. Pourquoi un contrefort aussi haut mais pas de voûte au premier étage ?
Préserver l’existant
«Restaurer, mais préserver l’existant et toutes les traces historiques. L’idée, c’est de consolider par des greffes pour garder la matière initiale. Les archives d’époque seront également précieuses pour reconstituer l’évolution historique du site», confie Aurore de Dinechin. En priorité, il faudrait restaurer la façade et le toit, afin de préserver au mieux le bâtiment de l’humidité. Et, à terme, pour l’association, accueillir à nouveau les pélerins.
Sous le charme
L’équipe est unanime, le lieu est très inspirant. «Il y a beaucoup de dignité dans cet endroit, la salle basse est un bijou. Il y a une histoire passionnante à décrypter. Ces sites remarquables sont témoins de leur époque et de leur territoire, via les matériaux choisis et les savoir-faire locaux. Ce qui se faisait ici ne se faisait pas ailleurs.Ce sont des lieux sacrés parce que très terre à terre, sans compter les sources et les courants télluriques» admet Paul-Alexandre Lemoine, architecte du patrimoine basé à Rambouillet. Les diagnostics en cours n’incluent toutefois pas le vote des travaux mais à cœur Mormant rien d’impossible.
Elise Sylvestre