À l’arraché – L’édito de Patrice Chabanet
L’équipe de France s’est donc qualifiée pour les huitièmes de finale. Une victoire à l’arraché sur le Pérou. D’où la sempiternelle question : vaut-il mieux gagner sans gloire que perdre avec panache ? On connaît la réponse de tous les spécialistes du ballon rond : seul compte le « réalisme », entendez vaincre l’adversaire. Tant pis pour la beauté du sport rangée au rayon des accessoires. Sauf qu’avec ce genre d’argument, les matches deviennent ternes et insipides. On l’a vu avec la rencontre contre l’Australie. Hier, contre le Pérou, la première mi-temps a allié bonne qualité de jeu et efficacité, avec le but marqué par le talentueux Mbappé. Mais la seconde mi-temps a vite marqué les limites physiques des Bleus. Ils se sont montrés incapables d’accroître leur courte avance d’un petit but. Ils ont souvent senti le vent du boulet de l’égalisation. Retour dans l’ornière d’une équipe qui ne convainc jamais depuis des mois. Visiblement, les grosses pointures des plus grandes équipes d’Europe fatiguent vite dès lors qu’elles revêtent la tunique bleue.
Dans ces conditions, la répétition de l’épopée de 1998 oscille entre l’impossible et l’improbable, en dépit de la glorieuse incertitude du sport. L’absence d’un véritable meneur de jeu, à la Zidane, risque de se faire sentir cruellement dès les huitièmes de finale…Pourtant, les supporters veulent y croire. C’est leur raison d’être. Dans les cafés ou sur les réseaux sociaux, la victoire sur le Pérou a été vécue à la fois comme un soulagement ou un signe avant-coureur de la bonification du Onze tricolore. Comme si le pays voulait s’agripper à un rêve, celui de revivre les émotions d’il y a vingt ans. Il n’y a que le foot pour faire défiler des centaines de milliers de personnes sur les Champs-Elysées. Des leaders politiques s’y sont essayés il y a quelques mois. En vain. Alors, Messieurs les joueurs, faites un effort. N’oubliez pas qu’un match dure 90 minutes et pas 45. Ronaldo, quand il marque trois buts contre l’Espagne, il se donne à fond pendant toute la partie.