A la trappe – L’édito de Patrice Chabanet
Le conflit russo-ukrainien a déjà fait une première victime en France : l’élection présidentielle. A moins d’un mois de l’échéance elle est toujours piégée dans la trappe de l’oubli. La pandémie l’avait fait dégringoler dans l’échelle des préoccupations des Français. La guerre, si proche de nous, ne lui donne aucune chance de remonter à la surface. Pas question de s’en prendre aux médias et aux politiques pour expliquer cette relégation dans les priorités secondaires. La réalité est beaucoup plus simple dans l’esprit de l’opinion publique : comment réduire l’impact économique de cette guerre ? Augmenter les tarifs de l’essence ou ceux de la baguette ? Prévoir des subventions ? On est loin du débat de fond que l’on est en droit d’attendre d’une campagne présidentielle. Les différents candidats sont eux-mêmes tétanisés – et on les comprend – par ce qui se passe en Ukraine. Certains, comme Mélenchon, Le Pen et Zemmour, sont d’ailleurs rattrapés par leurs déclarations antérieures sur Poutine présenté comme un modèle politique. Il n’est donc pas dans leur intérêt de mettre en avant leur volte-face. Les autres candidats n’en ont pas profité, faute d’avoir de solides munitions sur les autres terrains ou, plus clairement dit, des programmes lisibles armaturés autour de deux ou trois idées-force.
Il est clair qu’Emmanuel Macron n’est pas pour rien dans cette atonie générale. Sa priorité du moment est le règlement de la crise ukrainienne. En tant que président de l’Union européenne il n’a pas le choix. Il en joue et laisse les autres candidats se débrouiller entre eux, ce qui lui évite de prendre des coups jusqu’au dernier moment. Dans le cas plausible, sinon probable, d’une victoire finale les lendemains du scrutin risquent d’être difficiles, voire douloureux. Car Ukraine ou non, les défis auxquels est confrontée la société française, seront toujours là.