A chacun sa vérité – L’édito de Patrice Chabanet
L’ évolution de la pandémie fait progresser nos connaissances. Elle met au jour en même temps un vaste champ d’incertitudes. On en revient au constat de Socrate : « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien ». C’est du moins le sentiment éprouvé par les non-initiés, c’est-à-dire la majorité de l’opinion publique. Comment se faire une religion sur la gestion d’un phénomène inédit quand les spécialistes y vont chacun de leur petite musique ? Faut-il reconfiner ? Oui, et tout de suite, plaident les uns. Non, assurent les autres, car il n’y a pas encore urgence. En fait, la base du raisonnement est minée dans chaque cas par une interprétation des chiffres et leur extrapolation. Le variant anglais ne pourrait qu’exploser et doper la pandémie, avec le risque de saturer nos structures hospitalières, nous expliquent ceux qui s’appuient sur des exemples étrangers, comme celui du Portugal. Le cas français est spécifique et comparaison n’est pas raison, objectent avec la même assurance leurs contradicteurs, avec un argument qui se tient : le variant anglais progresse chez nous, c’est vrai, mais rien à voir avec une progression exponentielle. Bref, comprenne qui pourra.
On pourrait multiplier ces zigzags de l’information prête à emporter, chacun défendant sa boutique spécialisée. Le variant anglais serait finalement plus mortel. Celui d’Afrique du Sud serait plus redoutable encore. Les vaccins ne protègeraient pas autant qu’on le dit et leur durée d’efficacité reste encore inconnue. Face à ce déferlement, à jet continu, de nouvelles contradictoires, sans parler des polémiques politiques, on est en droit d’admirer la patience des Français. On les disait hostiles au vaccin. Aujourd’hui, ils en redemandent et se plaignent de la lenteur des procédures. La voix de la sagesse sans doute. Ou plus sûrement celle du pragmatisme qui privilégie l’action et relègue les palabres sans fin. Le bilan se fera après.