Commentaires (0)
Vous devez être connecté à votre compte jhm pour pouvoir commenter cet article.

Violences conjugales – Acte I

Deux dossiers de violences conjugales ont été présentés, jeudi après-midi, devant le tribunal correctionnel. Confronté à une situation d’extrême alcoolo-dépendance, Holden Caulfield a été condamné à deux ans de prison dont seize mois assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve.

 

Certaines données suffisent à décrire l’ampleur du phénomène. Une Française sur dix est victime de violences imposées par un homme, ces agressions constituant la première cause de mortalité et d’invalidité chez les Européennes âgées de 16 à 44 ans. A mille lieux de la médiatique imagerie des agressions de rôdeurs et autres pervers, les violences sont principalement commises au sein des ménages. La moitié des viols est ainsi exercée dans le cadre conjugal. A l’échelle du territoire national, une femme meurt ainsi tous les trois jours suite aux coups portés par son compagnon. Ces drames hebdomadaires cachent une masse des violences beaucoup plus perfides. Pour de nombreux époux, la vie commune autorise insultes, pratiques sexuelles imposées et autres formes d’avilissement. Si les violences conjugales touchent l’ensemble des milieux, certaines réalités témoignent de véritables inégalités. Les femmes sans diplôme sont ainsi particulièrement exposées aux violences domestiques comme le soulignent diverses études. L’ensemble des classes sociales est toutefois frappée par un véritable fléau.

Souvent occultée, cette réalité surgit régulièrement en salle d’audience. A 49 ans, Holden Caulfield incarne le comportement de nombreux hommes. D’une apparence ordinaire, ce père de onze enfants a répondu de faits de violences aggravées et de violences sans incapacité sur conjoint, délits commis en récidive suite à diverses décisions intervenues ces dernières années.

Interpellé en début de semaine et immédiatement placé en détention provisoire, le prévenu n’aura pas tardé à faire état de la nature de sa relation avec sa compagne. «Je suis sorti de prison en mai dernier, un voisin m’a présenté cette femme début juin et nous nous sommes mariés le 13 août, se remémorait le prévenu. Nous avons des problèmes d’alcool, elle comme moi. Je reconnais les violences, mais nous nous aimons !»

«Pathétique»

Les dites violences ont connu une évolution graduelle. Insultes et coups sont assenés dès les premiers mois. Mardi dernier, les policiers interviennent suite au signalement d’un voisin. Le témoin livre un récit édifiant : manifestement ivre, Holden Caulfield a insulté sa femme avant de lui porter deux coups de poing au visage et de la saisir par bras et cheveux. «Je n’ai pas mis de coups de poing, mais des baffes», soutenait le prévenu. Constatant un traumatisme au niveau du nez, le médecin venu au chevet de la victime établira une Incapacité totale de travail (ITT) de trois jours. L’épouse du mari violent ne pourra toutefois être entendue par les enquêteurs. Et pour cause : cette ancienne aide-soignante en proie à diverses difficultés n’a pu être localisée depuis l’agression.

Soulignant le côté «pathétique» du dossier, le «casier éloquent» du prévenu et un «état de récidive légale», le procureur Prélot invitait le tribunal à appliquer une peine plancher de trois ans de prison ferme tout en assortissant une partie de la peine d’un sursis avec mise à l’épreuve. A des obligations de soins et de travail, le représentant du Ministère public ajoutait une éventuelle interdiction de séjour en Haute-Marne. Le magistrat sollicitait par ailleurs un maintien en détention visant à protéger la victime.

L’ensemble des propositions du Parquet n’aura pas été retenu par le juge Thil et ses assesseurs. Condamné à deux ans de prison dont seize mois assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve, Holden Caulfield devra respecter des obligations de soins et de travail durant trois ans. Le maintien en détention a été écarté. «Le juge d’application des peines décidera d’un éventuel aménagement de votre peine. Je vous conseille de débuter une cure dès demain, c’est votre seule chance d’éviter la prison», indiquait le juge Thil à l’adresse d’un prévenu appelé à respecter de strictes obligations de soins.

 

«Un milieu très carencé»

Comptant un total de dix condamnations depuis 1985, Holden Caulfield a été condamné à plus de trois ans de prison entre 2001 et 2009 pour divers méfaits dont des violences commises sur l’enfant d’une ancienne concubine. Assurant la défense du prévenu, Me Boesch a fait valoir la rareté des mesures susceptibles d’assurer la réinsertion de son client. «Il est indiqué que l’épouse de monsieur n’a pu être localisée, mais on ne sait pas si madame se cache et encore moins si elle est terrorisée, soulignait l’avocate. Ce procès est celui de la misère sociale et de la déchéance. Monsieur est de 18 ans l’aîné de madame, ils disent s’aimer, ils boivent et cette femme n’a pas le moindre droit de visite sur son enfant suite à une décision de justice. Cette femme évolue dans un milieu très carencé et elle présente de nombreuses difficultés. Mon client a été condamné à plusieurs reprises, mais un seul sursis avec mise à l’épreuve a été prononcé en l’espace de 26 ans. Il serait peut-être judicieux de retenter l’expérience, ce sursis serait révoqué dans le cas où il ne respecte par les obligations fixées par le tribunal. L’alcool est au coeur de ce dossier ! Il veut suivre une cure, ça me semble être la bonne solution. Il ne frappe pas lorsqu’il est à jeun, il frappe lorsqu’il a bu !» Les arguments de Me Boesch auront été pris en compte par le tribunal. Le non respect de l’obligation de soins imposée au prévenu entraînerait l’application de la peine de huit mois de prison ferme et la révocation du sursis avec mise à l’épreuve. Holden Caulfield serait ainsi condamné à purger deux ans de détention.

Sur le même sujet...

Reconnu coupable d’agression sexuelle, il écope de 36 mois de prison dont 12 mois avec sursis
Abonné
Langres
Reconnu coupable d’agression sexuelle, il écope de 36 mois de prison dont 12 mois avec sursis
Tribunal correctionnel

Un homme de 38 ans a comparu détenu mardi 23 avril devant le tribunal judiciaire de Chaumont, pour agression sexuelle sur sa compagne dont il était une nième fois séparé(...)

Gifles à son épouse, avant de la poursuivre : « j'étais dans un tourbillon »
Abonné
Chaumont
Gifles à son épouse, avant de la poursuivre : « j’étais dans un tourbillon »
Tribunal correctionnel

Un quadragénaire a comparu devant le tribunal correctionnel pour violences conjugales, lundi 22 avril. Fini, le verbe, sa colère explosive s’était notamment traduite par des gifles à son épouse, le(...)

Violences aggravées sur sa mère : « je ne me croyais pas capable de faire ça »
Abonné
Valcourt
Violences aggravées sur sa mère : « je ne me croyais pas capable de faire ça »
Tribunal correctionnel

Une fille à laquelle des faits de violences aggravées sur sa mère sont reprochés. En récidive. À qui la justice a proposé un encadrement pour se libérer d’addictions délétères. À(...)