Champenois et Lorrains à l’assaut de Royan et d’Oléron
Entre le 14 avril et le 1er mai 1945, les anciens maquisards de l’Aube, de la Haute-Marne et de la Meurthe-et-Moselle engagés dans les 131e et 150e régiments d’infanterie ont pris part à l’assaut des derniers ports de l’Atlantique encore aux mains des Allemands, quelques jours avant la fin de la guerre.
Ils espéraient porter le fer en Allemagne. Mais c’est dans l’Ouest qu’une décision les a finalement affectés, en février 1945. Ils, ce sont les anciens maquisards qui ont été incorporés dans deux régiments recréés au sein de la nouvelle française. Ceux de l’Aube, de la Haute-Marne et de l’Eure-et-Loir ont été intégrés dans le 131e régiment d’infanterie. Placé sous les ordres du colonel René Cohendet puis du lieutenant-colonel Norbert Durand, le 131e RI a vu le jour le 8 décembre 1944 à Troyes et à Dreux. Particularité qui témoigne de l’état de dénuement dans lequel se trouvait l’armée française à cette époque : les Champenois sont coiffés… de casques italiens récupérés à Troyes. Le 22 février 1945, le 131e monte en ligne devant La Rochelle. Dès le 1er mars, il est engagé dans une contre-attaque.
Quant au 1er bataillon du 150e RI, lui aussi vient de l’Est. Il regroupe des anciens FFI de Meurthe-et-Moselle et des Vosges, et il est également arrivé en février 1945 dans l’Ouest, mais devant Royan.
Pertes notables
Dunkerque, Lorient, Saint-Nazaire, La Rochelle, Royan, Soulac-sur-Mer… Tels sont les ports dont les garnisons sont assiégées par les Forces françaises de l’Ouest, amalgame d’anciens maquisards et de troupes venues d’Afrique – au grand désarroi, par exemple, du général Leclerc, qui aurait préféré que sa 2e division blindée franchisse le Rhin plutôt que de se battre au bord de l’Atlantique.
Après sept mois et demi de siège, l’offensive contre les Poches du Sud-Ouest est lancée le 14 avril 1945. Le I/150e RI du commandant Cyrille Blangenois prend part à l’assaut de la ligne d’avant-postes devant Royan. Assommés par la préparation d’artillerie française, les Allemands ne réagissent que sporadiquement, et en deux heures, les Lorrains atteignent tous leurs objectifs : Semussac, le bois de la Chasse et le château de Didonne. Toutefois, ses pertes sont notables, notamment devant la ferme de la Chasse : neuf tués et 29 blessés.
Les ruines de Royan
Le 16 avril, c’est le II/131e RI qui est lancé dans la bataille en soutien des blindés de la 2e DB. Sous les ordres d’un Haut-Marnais, le commandant Lucien Vel, né aux Loges, les Aubois enlèvent la position fortifiée de Jaffe, le jour où les Français entrent dans les ruines de la ville de Royan, détruite malheureusement en janvier 1945 par un bombardement allié inutilement meurtrier. Les combats prennent fin le 18 avril, ayant coûté aux Français 154 tués et 700 blessés.
Au sud de l’estuaire de la Gironde, c’est ce même 14 avril 1945 que la conquête de la Pointe de Grave, dans le Médoc, est engagée. Les premiers à se battre – durement – sont les FFI du Lot, des Landes, du Lot-et-Garonne, de la Gironde, du Tarn-et-Garonne. Rendu disponible par l’évolution favorable des opérations de Royan, le 131e est jeté dans la lutte le 18 avril. Les Champenois du 1er bataillon et les Euréliens du 3e se heurtent à de très sérieuses résistances, qui leur coûtent douze tués et 72 blessés le premier jour. Mais le 20 avril, le 131e qui compte en son sein quelques volontaires de Laferté-sur-Aube comme Prosper Fournier contribue à la conquête du Fort du Verdon et de la Pointe de Grave.
D-Day français
La participation de ce régiment aux combats particulièrement méconnus contre les « Poches de l’Atlantique » n’est pas terminée. Le 30 avril 1945, les volontaires de Dordogne et du Gers de la Division de marche Marchand débarquent sur les plages de l’île d’Oléron. La résistance est faible, et les Champenois du 131e qui arrivent en renfort progressent assez aisément. Le 1er mai, les hommes du capitaine Bourguignon participent à la prise de Saint-Pierre-d’Oléron. A 20 h, après la prise du fort de Chassiron, l’île redevenait française. Six jours plus tard, l’Allemagne annonçait qu’elle capitulait.
Lionel Fontaine