La misogynie au temps du numérique

DROITS DES FEMMES. Jeudi 7 mars, au Ciné-Quai à 20 h, le groupe 32 Le Perthois d’Amnesty International a diffusé le long-métrage documentaire “Je vous salue salope”. Ce film, réalisé par Lea Clermont-Dion et Guylaine Maroist, dévoile les inqualifiables comportements misogynes au temps du numérique.

Quatre femmes et un homme particulièrement touchés décrivent le cyber-harcèlement dont ils ont été victimes. Sur Twitter, un maire incitait à violer Laura Boldrini, femme politique italienne, Kiah Morris, politicienne afro-américaine de l’état du Vermont a été forcée de démissionner après avoir été harcelée et menacée en ligne par des membres de l’extrême droite ; Marion Seclin, comédienne et YouTubeuse française, a reçu plus de 40 000 messages sexistes, incluant des menaces de viol et de mort ; Laurence Gratton, jeune enseignante québécoise, a été harcelée pendant 5 ans par un ancien collègue de classe. Glen Canning relate comment sa fille de 15 ans, victime d’un viol dont les images se sont propagées jusqu’à devenir virales sur la toile, s’est donnée la mort.

La haine en temps réel

Ce documentaire aux airs de thriller s’attache à montrer comment les victimes ressentent au quotidien cette violence soi-disant virtuelle. On vit en temps réel les vagues de haine qui les assaillent, la peur qui envahit leur espace intime, la perte du sentiment de sécurité. Une existence dans laquelle perte de confiance et honte se côtoient. “Je vous salue salope” montre aussi la volonté commune de ces victimes de ne plus se taire.

Après une présentation par Mireille Lacroix, présidente du groupe d’Amnesty de Saint-Dizier, la projection a été suivie par un échange avec le public, orchestré par Sandrine Chauchot. Lors de cette discussion, elle a rappelé que la violence contre les femmes se déroule maintenant aussi dans le monde numérique. Toutes les femmes, filles et minorités de genre sont exposées à ces violences. Les recherches menées par Amnesty International dévoilent que les victimes de ces cyber-agressions sont plus particulièrement : des femmes défenseures des droits humains ou actives en politique, des journalistes et des femmes militantes présentes sur les réseaux sociaux. Les violences en ligne sont à l’origine de troubles majeurs pour leur santé : elles engendrent un impact psychologique dans 80 % des cas, et même un impact physique pour 1 victime sur 2 (46 %). Dans plus d’1 cas sur 2 (51 %), la victime est âgée de moins de 30 ans. Les personnes identifiées comme responsables des cyberviolences sont des hommes dans au moins 74 % des cas.

Des policiers formés aux cyberviolences

Au commissariat de police de Saint-Dizier, des personnels ont reçu une formation spécifique sur les cyberviolences. Ils enquêtent sous pseudo et les techniques d’aujourd’hui leur permettent de retrouver assez facilement les responsables. Il leur est relativement aisé d’obtenir l’adresse IP d’un auteur de messages illicites. Les procédures sont nombreuses, elles sont traitées en urgence et concernent en majorité des mineures, parfois même âgées de moins de 13 ans.

Il est à noter que les personnes victimes ne veulent pas forcément porter plainte, par peur des représailles. Il existe pourtant une permanence, au commissariat, avec des travailleurs sociaux et des juristes qui apportent une écoute et une aide dans les démarches. La police organise aussi des campagnes d’information et de prévention dans les collèges et lycées.

De notre correspondante Pascale Rigaut