Annonciades, un collectif de défense se constitue
La vente de l’ancien couvent des Annonciades par l’hôpital à Julien Cohen suscite bien des questions. Si pour l’instant seule une promesse de vente a été signée, un collectif s’est constitué dans l’optique de défendre l’intérêt public.
«Nous agissons dans l’intérêt des usagers et du pôle de santé langrois», lance tout de go Mathieu Thiebaut, président de l’association Avenir santé Sud Haute-Marne, membre d’un collectif qui vient de se constituer. Sans surprise, Sophie Delong et Jean-Jacques Franc en font partie. Depuis l’annonce de la vente au célèbre brocanteur, Julien Cohen, ils ont fait montre d’un certain scepticisme quant au bon déroulement de la transaction. Avec eux, un particulier , Lucien Julienne, qui le premier s’est offusqué des conditions de la vente.
Depuis l’annonce, à la mi-août 2023, que Julien Cohen souhaite installer une maison des Brocanteurs à Langres et dans l’ancien couvent des Annonciades, beaucoup y voient une chance extraordinaire pour la ville. C’est aussi pour l’hôpital qui en est propriétaire se retirer une épine dans le pied tant ce bâtiment, inscrit au Monument historique, lui coûte.
«Je dépense rien que pour le chauffage 80 000 € par an pour chauffer les Annonciades. C’est pratiquement le salaire d’une infirmière pour l’hôpital», compare Solenne Robert, directrice de l’établissement.
Recours gracieux accepté sur le déclassement des Annonciades
Mais d’autres voient une transaction qui ne semble pas totalement limpide. Preuve en est où le collectif avait déposé un recours gracieux auprès de la direction de l’hôpital le 26 janvier sur la décision de déclasser les Annonciades des domaines publics le 16 octobre 2023 au motif que le bâtiment était encore occupé par le personnel administratif à cette date.
Le directeur par intérim, Freddy Servaux, avait alors décidé de retirer sa décision « faute pour elle de comporter la mention du délai de désaffection prévu par l’article L2141-2 du code général de la propriété des personnes publiques et de n’avoir pas fait l’objet de l’accord préalable du directeur de l’Agence régionale de santé (…) ». Dans la foulée, le directeur par intérim reprenait sa décision identique mais dans les règles cette fois. Une première victoire pour le collectif pour la forme uniquement.
Ce qui inquiète le collectif c’est « comment s’est organisée cette vente », rappelle Sophie Delong. Le collectif estime que cela reste trop obscur. Il constate qu’aucune publicité n’a été faite au préalable, que le prix de vente est sous-estimé, en tout cas inférieur de 21 % du prix des Domaines « sans justification ».
Pour l’instant, il n’y a aucune vente de signée, encore moins de compromis, juste une promesse de vente au prix de 340 000 € avec une option d’achat pour le bâtiment de l’Ouvroir, situé à côté pour 40 000 € et estimée 64 800 € par les Domaines. « Nous n’avons aucune obligation de solliciter les Domaines mais cela a été fait quand même », rappelle Solenne Robert.
Ce point a d’ailleurs été rappelé au collectif par le courrier de Freddy Servaux du 9 février. De même, il rappelle qu’il «est de jurisprudence bien établie qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose à une personne morale de droit public autre que l’Etat de faire procéder la vente d’une dépendance de son domaine privé d’une mise en concurrence préalable». La publicité ne s’applique donc pas au préalable d’une vente.
«Où est l’urgence de faire les choses dans les règles ?»
Mais le collectif reste persuadé que certains actes demandes des éclaircissements. «Où est l’urgence de ne pas faire les choses dans les règles ?», s’interroge à juste titre Sophie Delong. Et dans ce cas, si le collectif est dans son bon droit, l’acquéreur pourra les remercier d’avoir pu éviter un écueil réglementaire.
Mais dans l’immédiat, c’est la prudence qui prévaut. En effet, la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) nous a informé que «le dossier de demande d’autorisation de travaux vient tout juste d’être réceptionné par la DRAC ce lundi 4 mars, et son instruction vient de débuter.» Et cela va demander plusieurs semaines. Une ouverture de la Maison des brocanteurs pour cet été 2024 n’est plus d’actualité.
Solenne Robert a reçu ce jeudi 7 mars une délégation de la DRAC et de l’ARS pour visiter les deux bâtiments en prévision de la vente.
On sent la directrice de l’hôpital agacée par la tournure que prend ce dossier autour de polémique qui lui semble stérile. «Nous ne faisons pas les choses à la légère. L’ARS va avoir un contrôle de la légalité de la transaction. Elle peut exercer un recours», rappelle-t-elle.
Quant au collectif, il estime qu’il y a matière à poursuivre son action et cette fois au Tribunal administratif.
Ph. L.