Marie José Lallart : le chemin de la maman aux mille enfants
Le monde est son terrain, la Haute-Marne son refuge. Marie José Lallart, castelvillanoise à temps partiel, fait partie de ces personnalités exceptionnelles qui peuplent discrètement notre territoire. Elle vient de publier aux éditions L’Harmattan un recueil de textes et de poèmes qui bruit de tout son vécu, de ses ressentis, de ses émotions. Il s’intitule “La voix de l’ombre ” et va “Bien au-delà de la poésie”.
Marie José Lallart a une carte de visite impressionnante : docteur en en philosophie, fonctionnaire internationale de l’Unesco pendant 30 ans, chevalier de la Légion d’honneur… Elle, par contre, se définit tout simplement par ce qu’elle fait : « écrivaine, poète, chanteuse lyrique et maman mille fois ». Maman de tous ces enfants qu’elle a aidés et aide encore aujourd’hui en menant de par le monde des projets de soin, d’éducation, de réinsertion des enfants victimes des guerres ou des tremblements de terre, abandonnés, en détresse.
On m’appelait “Madame Ballon”
Tout a commencé à l’Unesco quand Marie José Lallart a été sollicitée pour aider des projets de tournois sportifs entre les enfants d’ethnies différentes qui avaient connu la guerre. Ils ont remporté un tel succès qu’elle a poursuivi dans différents pays. On découvrait le sport comme moyen d’aider à la paix. Lors d’un tournoi à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo, elle a mesuré l’ampleur des besoins d’aide dans ces pays où les enfants des rues dorment dans les cimetières : « On peut avoir fait des études de philo, de psycho, être largement diplômée, on n’apprend pas comment se comporter avec des enfants en grande détresse ». Dès lors elle consacrera toute sa carrière à « lutter contre cette injustice-là », à aider à la création «des écoles de l’espoir ». « Nous sommes intervenus, ajoute-t-elle, dans plus de 70 pays dont une majorité en Afrique, en leur fournissant, à l’aide de sponsors, du matériel scolaire et sportif et en demandant en échange qu’ils intègrent tous les enfants sans distinction ».
Aujourd’hui et demain : « leur rendre la dignité »
A la retraite, Marie José Lallart n’a pas pu s’arrêter : « j’avais tous les contacts je devais continuer ». Elle a alors créé l’association “Les maillons de l’espoir” à Bukavu, au Congo, où des milliers de filles sont victimes de viols de guerre. Celles qui ont survécu à l’horreur, et que leurs familles rejettent parce qu’ “elles sont souillées”, peuvent trouver dorénavant des soins dans un hôpital puis une “maison de transit” où on leur donne les outils de l’autonomie : lire, écrire, compter, une formation professionnelle, le tout complété par des activités sportives.
Un autre projet concerne les enfants albinos au Burundi, eux aussi rejetés, mis au ban de la société.
« Le principe, explique Marie José Lallart, est de créer des chaînes de solidarité : trouver des sponsors, solliciter des dons, avoir une ONG sur place en appui avec un bureau de l’Unesco et créer des foyers d’accueil partout où il y a des besoins urgents ».
Ecrivaine et Guerrière du Dahomey
Alors bien sûr, la confrontation avec la misère, la détresse ne la laissent pas intacte : « à chaque fois que j’ai connu une situation difficile, je rentre dans ma chambre d’hôtel et j’écris… Ecrire pour relater, écrire pour témoigner, écrire pour verbaliser ses émotions, son ressenti, elle le fait depuis longtemps et ses textes, beaucoup de poèmes, paraissent dans une collection qu’elle a créée chez Harmattan et qui s’intitule “Exclamationniste”. Marie José Lallart a aussi publié chez Actes Sud un recueil de témoignages d’enfants : “Les enfants invisibles”.
«Un homme n’est jamais si grand que lorsqu’il est à genoux pour aider un enfant»
Ce dernier recueil, où elle prend, dit-elle, « le risque de se dévoiler », est composé de courts récits tirés de son vécu, de dialogues, de poèmes où reviennent souvent les mots de « doute, illusion, regret, ombre, brume mais aussi de lumière et d’espoir ». Elle y montre aussi toute l’importance qu’ont pour elle, qui aime chanter, les voix et le silence. L’illustratrice Odile Pinto Corbin est d’ailleurs une de ses amies chanteuses.
« J’ai plein de décorations, sourit Marie José Lallart. J’ai reçu par exemple des médailles des mains d’Arafat, du pape qui m’a décorée de “la Rose d’or” et j’ai même été promue « guerrière du royaume du Dahomey (actuel Bénin, Ndlr) » Mais ce que j’aime, c’est vivre sur le terrain, connaître les réalités d’un pays, aller parler aux enfants, échanger avec eux, les écouter, servir à quelque chose ».
De notre correspondante
Françoise Ramillon
Pour en savoir plus : site web : https://www.helloasso.com/associations/lesmaillonsdelespoir
L’ombre de ta main (poème de Marie José Lallart)
L’ombre de ta main s’étend doucement
En bravant la nuit sans lune
Elle vient se poser sur la lèvre de regret de l’enfant
Dans son regard de justice et d’amour
L’ombre de ta main veut rejoindre la mienne, mais le vide
Le silence entre nous où dorment la mélancolie, l’amour et l’indifférence
Là où poussent l’anémone et le bleuet
La distance se réduit sans parole, dans le silence du jour qui ose
Te rappeler le sommeil sans rêve, sans retour au réel
Au creux du cœur de l’inconnu
L’ombre de ta main ne retrouve plus
Sa lumière, celle qui va reconnaître
La douleur infinie de ton âme blessée et couverte de l’indifférence de ceux que tu as aimés
Prends ma main et serre-la contre ton cœur, elle va te réchauffer