Incompétence magistrale
Désespérant. Une fois de plus, il aura fallu un drame pour qu’un problème ancien soit enfin pris à bras-le-corps. Le suicide d’un adolescent, victime de harcèlement, nous le renvoie en pleine figure. La honteuse missive du rectorat qui l’a précédé est révélatrice du décalage entre le mal-vivre de certains jeunes et l’énorme machine de l’Education nationale. Désespoir individuel versus organisation kafkaïenne. Qui a conçu ce courrier en amont ? Qui l’a validé en aval sans jamais imaginer son côté dévastateur chez des parents désorientés ? Courrier de la « honte », a tranché le ministre de l’Education, Gabriel Attal.
Des sanctions, de lourdes sanctions, seront prises. Impossible de passer l’éponge sur une attitude irresponsable. Mais au-delà du drame de Poissy se pose la question de ce que doit être l’enseignement aujourd’hui. On ne peut pas déverser sur la tête des élèves les valeurs humanistes qui nous viennent du Siècle des Lumières et, en même temps, détourner le regard de comportements trop vite rangés au rayon des faits divers. Les pédagogues savent ou devraient savoir que l’adolescence est une phase critique dans laquelle une simple moquerie ou, au pire, une mise à l’écart peut fragiliser et parfois, on le voit, détruire une personnalité en devenir.
Pour le jeune de Poissy, c’est trop tard. On peut et on doit espérer que des leçons seront vite tirées. Et pas seulement par les rectorats. Les enseignants sont eux aussi concernés, tout comme les élèves. Avec les réseaux sociaux, véritables amplificateurs du harcèlement, personne ne peut dire : je ne savais pas. Beaucoup savent.