Le terrain Robinson, point de départ de la BA 113
Le 24 août 1913, sur la désormais ancienne commune de Hoéricourt, le terrain du Robinson était officiellement inauguré. Traversant les époques et les guerres, le site abrite aujourd’hui la Base aérienne 113. Retour sur sa création.
Dans son édition du mercredi 27 août 1913, la Liberté de la Haute-Marne (notre ancêtre qui paraissait alors trois fois par semaine) consacrait une page et demie – soit presque la moitié de son édition – à l’inauguration de Saint-Dizier Aviation. Le terrain « Robinson », situé sur la commune de Hoéricourt (détruite pendant la Seconde Guerre mondiale), avait été le théâtre du premier atterrissage d’un aéroplane sur le territoire trois ans plus tôt. Suite à quoi le Comité bragard d’aviation a vu le jour. L’une de ses missions était de construire un terrain d’aviation pour l’offrir au ministère de la Guerre.
Construction
Les fondations terminées, la première pierre sera posée le mardi 22 avril 1913, à 17 h. « Le hangar se composera d’un hall de 20 mètres sur 20. On prévoit que la construction pourra être achevée dans un délai de deux mois, tout au plus », précisait la plume de l’époque, Léon Ahyerre. Les financements d’alors émanaient de la souscription bragarde, la subvention du Comité national de l’aviation et le soutien du Comité bragard. « L’œuvre pourrait sembler n’avoir qu’un caractère local : en réalité, elle se rattache à la défense nationale et aux intérêts généraux du pays », commentait le député de l’époque Albin Rozet. Cent dix ans plus tard, la description colle parfaitement à la Base aérienne 113.
Le chantier sera achevé au cours de l’été, avant que le terrain Robinson ne soit officiellement inauguré le 24 août 1913. « Une belle manifestation patriotique », titrait alors la Liberté de la Haute-Marne, avec le détail précis ses festivités, la veille et le jour J, jusqu’au menu du banquet auquel ont pris part une soixantaine de personnalités. De multiples découvertes qu’il est possible de retrouver aujourd’hui grâce aux archives municipales de Saint-Dizier.
Inauguration
Parmi les phrases marquantes prononcées à l’époque, M. Thomas – président du Comité d’aviation – usait de la métaphore pour décrire le site : « Un gîte d’étape pour nos oiseaux de France, où ils viendront reposer leurs ailes et prendre de nouvelles forces ». De la reconnaissance pour le maire de Saint-Dizier, le docteur Mougeot, qui saluait les membres du Comité d’aviation militaire : « Ils ont su mener rapidement et à bien l’œuvre qu’ils s’étaient proposés de réaliser. » Le commandant Lindecker, délégué au ministre de la Guerre, rappelait l’inauguration « aujourd’hui même à Langres d’un hangar pour aéroplane et bientôt pareil à Chaumont ».
La suite, c’est une joie collective avec « un terrain d’aviation littéralement envahi » et « une foule que nous n’essaierons pas d’évaluer ». Une fête qui se poursuivra le soir au Jard à travers un feu d’artifice, la musique de l’Harmonie municipale et du Rallye bragard, ou encore l’illumination du Rond-Point par la Société électrique, pour se conclure par un bal.
Qui aurait cru à l’époque que ce « terrain » deviendrait 110 ans plus tard le plus gros employeur du département ?
Louis Vanthournout
Le terrain du Robinson, vu en 2023
Lorsque l’on demande à un militaire actuel de la BA 113 de parler histoire, le service communication propose rapidement un nom : le capitaine Jean-Baptiste. Il faut dire que ce dernier est depuis un an, le correspondant patrimoine du site militaire. « La toute première fois que j’ai mis les pieds à la base, c’était en 1986. Le souvenir que j’en garde, c’est le sentiment d’avoir rejoint une grande famille. On dit souvent que la première base, c’est la base de cœur. C’est le cas avec Saint-Dizier », explique-t-il.
Selon le capitaine, les 110 ans de l’inauguration officielle du terrain Robinson ont des allures de « simple anniversaire en local hormis pour les personnes attachées au patrimoine. Même si, l’évocation du 24 août peut susciter la curiosité ». Illustration de ce sentiment, il n’y a pas eu de célébration au sein de la BA 113 ce jeudi. Il faut dire que sur place, il ne reste guère de trace du hangar érigé en 1913. Le site a évolué pour accueillir aujourd’hui 1 800 personnes ; par exemple, l’unité de notre interlocuteur « a changé deux fois de bâtiment ».
Toutefois, ce passionné de patrimoine revenu en terre bragarde en 2021, travaille sur des projets en lien avec la mémoire. Deux mois plus tôt, le 20 juin, le capitaine Jean-Baptiste a contribué à la venue d’un Jaguar, l’avion mythique de la BA 113, pour son cinquantième anniversaire. D’autres idées sont dans les cartons, dont la rénovation de la stèle du Mirage IV. Affaire à suivre.