Louise Michel et Auberive : l’enfer ou peu s’en faut
Emprisonnée et condamnée après l’écrasement de la Commune, Louise Michel séjournera 20 mois à l’abbaye d’Auberive, qui est alors une prison pour femmes.
Le grand industriel amateur d’art Jean-Claude Volot apologiste amoureux de Louise Michel, la vierge rouge ? Le paradoxe n’est qu’apparent. Lorsqu’il advient aux chanceux de visiter l’abbaye d’Auberive, guidés par le propriétaire de ce lieu magique, il ne manque jamais de rappeler que l’égérie de la Commune, née à Vroncourt – la Haute-Marne, décidément… – a séjourné sur le site : elle y était prisonnière, condamnée au bagne. Car l’abbaye d’Auberive, au si dense passé, fut aussi une prison pour femmes.
C’est en 1856 que l’Etat rachète les bâtiments – dont les cellules des moines d’antan – pour en faire une prison réservée aux femmes.
De Versailles à Auberive
En 1871, après les tragiques événements de la Commune de Paris, Louise Michel, condamnée à la déportation, est transférée avec ses compagnes d’infortune de la prison de Versailles à celle d’Auberive. Elle y arrive la veille de Noël, au terme provisoire d’un voyage éprouvant, dans le froid, sans rien à manger.
Louise Michel écrit : « Une grande porte s’ouvrit en grinçant et nous fûmes introduites dans une salle au milieu de laquelle trônait un poêle qui répandait une douce chaleur. C’était la première fois que nous voyions du feu depuis notre incarcération. Nous nous étions approchées pour nous chauffer, un gardien nous repoussa violemment en hurlant : “Voulez-vous bien me ficher le camp, tas de drôlesses !” »
Elle y sera détenue 20 mois durant. Au fil des pages de ses riches mémoires, elle décrit sa vie de prisonnière : «Je revois Auberive avec les étroites allées blanches serpentant sous les sapins ; les grands dortoirs où, comme autrefois à Vroncourt, le vent souffle en tempête et les files silencieuses de prisonnières, sous la coiffe blanche, pareille à celle des paysannes ».
A Auberive, Louise Michel écrira quelques poèmes. Peu de temps avant son départ, elle rédige ceci : « Vous avez voulu que je vive, Pour vous c’est la fatalité ! Vous me verrez, de vive en vive, Jeter le cri de liberté. J’irai partout, criant justice, Appelant les sombres vengeurs, Afin que chacun vous maudisse… pouvantables égorgeurs !»
L’incarcération n’a pas émoussé la rage de l’écorchée vive !
Elle part de l’abbaye d’Auberive le 24 août 1873 à l’aube. En direction du bagne, en Nouvelle-Calédonie.
« Je crois que je serais morte, si on m’avait reconduite dans cette affreuse prison où j’ai tant souffert », écrira bien des années plus tard la plus célèbre des Haut-Marnaises.