Une folle journée – L’édito de Patrice Chabanet
L’histoire s’est accélérée en Russie, au point de nous faire presque oublier le conflit ukrainien. En moins de 24 heures on a vu, en direct, se déclencher un putsch, avec un groupe Wagner fonçant sur Moscou, avant de faire demi-tour. La marche d’Evguéni Prigojine n’a donc pas été jusqu’au bout comme celle de Mussolini sur Rome. Mais dans ce méli-mélo politico-militaire il est impossible de désigner les gagnants et les perdants. Certes Prigojine s’est résolu à faire machine arrière, mais c’est lui qui mène la danse et qui occupe le devant de la scène. Son recul pourrait n’être qu’apparent. L’homme est suffisamment retors pour rebondir aujourd’hui même ou d’ici à quelques jours. La faible résistance que lui a opposée l’armée russe en dit long sur le rapport de force.
A l’évidence, Poutine s’est retrouvé sur le reculoir, comme disent les spécialistes du rugby. Personne ne peut dire où il se trouve. Il est encore trop tôt pour vendre sa peau. L’univers russe est vaste et son inertie peut l’amener à soutenir le maître du Kremlin ou, au contraire, à le chasser du pouvoir.
Pour l’Occident, l’issue de la confrontation ne changera pas fondamentalement la donne. Poutine est un dictateur figé dans sa mégalomanie, comme en témoigne son agression contre l’Ukraine. Prigojine est un chef de gang qui recrute ses troupes dans les prisons. La peste et le choléra. Un vaste sujet d’inquiétude. On peut craindre en particulier la fuite en avant de l’un des deux protagonistes, ou des deux à la fois. Le pire n’est jamais sûr, mais il peut être devant nous.