LA FRANCE OUBLIÉE – l’édito de Patrice Chabanet
Assez régulièrement les gouvernements en place se souviennent que de larges pans de notre pays sont laissés à la traîne. Une forme de fatalisme liée à une conviction : le progrès passe par la concentration des moyens de production autour de grandes agglomérations et infrastructures. Aujourd’hui on ne parle plus d’exode rural, mais de « diagonale du vide » qui coupe la France en deux. Peu importent les termes utilisés. La réalité est là. Il y a deux France, celle qui avance et celle qui végète quand elle ne recule pas. Dire que rien n’a été fait serait exagéré. On se souvient du rôle joué par la Datar, de 1963 à 2014, chef d’orchestre de l’aménagement du territoire. Depuis, seuls les spécialistes sont à même de suivre l’évolution de cette structure administrative. De nouveaux acteurs apparaissent : un « secrétariat d’Etat chargé de la ruralité », une « Agence nationale de la cohésion des territoires » et un « Agenda rural ».
L’annonce faite hier par Elisabeth Borne vise à nous convaincre que le temps de l’action est venu avec le « Plan France ruralités ». Un catalogue de projets pour désenclaver le territoire, développer les commerces de proximité, lutter contre les déserts médicaux. Des priorités qui parlent aux habitants des régions délaissées mieux que les grandes théories. Et qui rééquilibrent l’annonce en fanfare d’impressionnants projets industriels comme celui d’une usine de batteries dans le Nord de la France.
La pertinence du plan gouvernemental est liée à l’évolution démographique. Avec le télétravail qu’a fait exploser le Covid, la ruralité se fait plus séduisante avec une conséquence directe : les « rurbains » sont et seront demandeurs de petits commerces et d’un minimum de services publics. Ils recherchent la sérénité, pas le désert. Pas question de les décevoir.