Et si la nature restait la meilleure des solutions ?
Pour s’adapter au changement climatique tout en préservant la biodiversité, les solutions fondées sur la nature (SFN) sont mises en avant. En s’appuyant sur les écosystèmes, l’objectif est d’apporter des bénéfices globaux pour la société.
Par Emma Gouaille, Sud Ouest
Revégétaliser des espaces artificialisés, restaurer des zones humides pour améliorer la capacité d’infiltration des sols et favoriser la biodiversité, préserver les forêts dunaires pour limiter l’érosion, replanter des forêts pour stocker davantage de carbone… Autant d’exemples de solutions fondées sur la nature (SFN).
Évoquées pour la première fois en 2009 à la Conférence des parties (COP) sur le climat de Copenhague, « ces solutions ont été définies précisément lors du Congrès mondial de la nature à Hawaii en 2016 », explique Nicolas Rodrigues, chargé de mission SFN pour l’Union nationale pour la conservation de la nature (UICN).
Ce sont des actions qui “protègent et restaurent des écosystèmes naturels” pour “relever, de manière efficace et adaptative, les défis de société” (lutte contre les changements climatiques, gestion des risques naturels, approvisionnement en eau, sécurité alimentaire). Ces actions contribuent à l’amélioration, à la fois, du bien-être des sociétés humaines et de la biodiversité.
Vivre en harmonie avec la nature et la préserver, n’est-ce pas évident ? Oui mais le potentiel de ces solutions est largement inexploité, insiste l’UICN. Le champ d’action est infini : forêts, littoraux, villes, agriculture… Plutôt que de chercher des innovations dans la technologie, il faut d’abord explorer les solutions offertes par la nature. « Une digue peut réduire temporairement le risque de submersion ; en revanche, elle a des impacts sur les écosystèmes adjacents. Là où il y a la digue, le trait de côte est préservé mais plus loin il est souvent encore plus grignoté par la montée des eaux. Son entretien est très coûteux et ce n’est pas favorable pour la biodiversité », explique Nicolas Rodrigues.
En Gironde, la restauration de la conche des Gaillouneys à la Teste-de-Buch, où les dunes étaient dégradées, a permis de limiter l’érosion littorale et la mobilité dunaire tout en favorisant l’apparition d’espèces. Les travaux ont consisté en l’écrêtage et le remodelage des dunes qui ont ensuite été recouvertes de branchages de pins et de genêts. Dans ce cas, il s’agit de restaurer et de gérer durablement l’écosystème.
Trouver un compromis
Pour encourager le recours à ces solutions, l’UICN publie des retours d’expérience détaillés.
Nicolas Rodrigues mène des recherches sur le sujet. « Nous cherchons des exemples qui entrent dans le cadre des SFN et étudions les résultats. J’interviens dans des journées techniques et ateliers thématiques pour vulgariser le concept. L’objectif est de le diffuser partout dans les politiques, pour qu’on recourt le plus possible à la nature pour répondre aux enjeux de société au lieu de solutions conventionnelles plus coûteuses et plus impactantes pour les paysages »
L’UICN a aussi développé un outil pour évaluer les différents projets au regard de la définition des SFN. Les huit critères permettent d’éviter qu’elle soit dévoyée dans les pratiques. L’action doit, notamment, être économiquement viable, reposer sur une gouvernance transparente et être adaptative pour être durable.
« L’idée est de produire des outils techniques pour aider les collectivités, les porteurs de projets. Il ne suffit pas de planter des arbres mais de penser à l’impact que la plantation peut avoir sur l’écosystème en lui-même : quel type d’arbre je veux planter, les impacts socio-économiques, est-ce que ça ne va pas nuire à d’autres usages de l’écosystème… L’objectif est de trouver un compromis entre les différents usages de la nature », ajoute Nicolas Rodrigues, qui constate parfois des dérives.
« Par exemple, planter des eucalyptus en monoculture pour créer un puits de carbone et atténuer le changement climatique n’apportera pas forcément de bénéfices pour la biodiversité. Cette plante est potentiellement dangereuse et inflammable. »