Le secret des ornières pour la Fête de la nature
Dans le cadre de la Fête de la nature organisée partout en France, samedi 27 mai, une balade en forêt de Chamouilley a plongé une cinquantaine de personnes dans l’univers des batraciens, notamment celui du sonneur à ventre jaune.
La Ligue de protection des oiseaux (LPO) de Champagne-Ardenne avait délégué ses bénévoles Quentin Horta et Etienne Clément ainsi que Julien Rouget, chargé de mission. Jean-Marie Rollet représentait Nature Haute-Marne, association de protection de la nature. Des membres de l’association Belles Forêt sur Marne, engagée dans la protection de l’environnement, se sont joints aux promeneurs.
Le but avoué de la balade était d’attirer l’attention du public sur la fragilité de l’écosystème des zones humides. Quentin, chercheur à Lund (Suède), a expliqué, au passage du ruisseau la Cousance, l’interaction des phénomènes biologiques, tels les feuilles qui tombent dans l’eau et nourrissent les gammares (petites crevettes grises) dont se repaissent les insectes, mets préférés des gardons ou des truites. Pour alléger l’effort nécessité par la montée prélude au chemin blanc, les marcheurs ont pu observer les feuilles de bardane qui imitent la rhubarbe, la berce velue aux fleurs blanches très prisées des insectes puis, dans le silence, écouter le chant de la fauvette à tête noire. « Le territoire de Chamouilley est riche de 86 espèces d’oiseaux référencées, dont la pie-grièche », a expliqué Etienne Clément. « On y trouve aussi la mésange à longue queue, surnommée la petite cuillère volante », a ajouté Quentin Horta.
Après avoir traversé la plaine balayée par la brise et pénétré dans la forêt, Quentin Horta, avec moult recommandations, a mené les promeneurs vers les ornières dont l’observation accrue a révélé un monde insoupçonné où règne sans partage le sonneur à ventre jaune. Ce batracien, dont le nom est lié à une note répétée à tue-tête, se différencie des crapauds et des grenouilles, c’est une espèce vulnérable, exigeante et l’indicateur de qualité de son habitat. « Là où il disparaît, la zone humide est menacée », a précisé Quentin Horta, « la Champagne humide est l’une des dernières régions où il subsiste ». « La survie du sonneur est liée aux activités humaines », explique Julien, « les ornières, favorables à la survie des batraciens, sont provoquées par les engins forestiers mais les sylviculteurs doivent les reboucher en remettant les chemins en état, c’est paradoxal ! ». « La quasi-totalité des amphibiens sont protégés », a précisé Etienne Clément, « le sonneur est intégré dans le programme Ramsar, Convention internationale de préservation des zones humides ».
Les marcheurs se sont retirés, presque sur la pointe des pieds, pour ne pas déranger les petits habitants. Nul doute qu’ils considéreront désormais les ornières de manière respectueuse et empêcheront les plus jeunes d’y patauger…
Le sonneur à ventre jaune, comme les seize espèces d’amphibiens répertoriées, est menacé par la destruction de son habitat, l’assèchement des zones humides et une maladie qui peut décimer jusqu’à 90 % des individus. Il mesure jusqu’à 5 cm et se reproduit sur un territoire d’environ 1 m2. Il peut parcourir 1 km en passant d’une ornière à l’autre mais le triton, son principal prédateur, peut dévorer jusqu’à 90 % de ses têtards.