Les pèlerins pris la main sur le câble
Leur objectif était de gagner les terres éthiopiennes afin de célébrer son impériale majesté Hailé Sellassié Ier… Partis d’Allemagne à bicyclette, un Camerounais et un Kényan ont été pris la main sur le câble. Condamnés à un mois de prison avec sursis, les pèlerins seront prochainement expulsés vers leurs pays respectifs.
Tristement connue pour sécheresses et famines décimant enfants et adultes aux silhouettes faméliques, l’Ethiopie demeure un haut lieu de pèlerinage pour des millions de croyants attachés à l’empreinte mystique d’un des premiers états chrétiens de l’histoire de l’humanité. Addis-Abeba, sommets enneigés du mont Ras Dashan et autre désert du Danakil sont particulièrement prisés des disciples de Jah Rastafari et de son impériale majesté Hailé Sellassié Ier. Vénéré par Bob Marley, incarnation du Christ pour certains, monarque éclairé pour d’autres, le dernier empereur d’Ethiopie incarne la toute puissance de la culture rastafari, mouvement prophétique aux racines bibliques ou hindouistes – selon les interprétations – façonnant le mode de vie de millions de fidèles.
Neville Livingston et Winston Rodney espéraient gagner les hauts plateaux éthiopiens dans le cadre d’un pèlerinage. Le périple de ce Camerounais et de ce Kényan renvoie aux parcours abracadabrantesques et néanmoins extraordinaires d’immigrés errant de découvertes en galères à plusieurs milliers de kilomètres de leurs terres natales. Etablis dans le Nord-Est de l’Allemagne, Neville Livingston et Winston Rodney ont décidé de gagner l’Ethiopie à bicyclette. Après avoir traversé les Pays-Bas et la Belgique, les deux migrants ont effectué plusieurs kilomètres sur le sol français avant d’échouer, samedi matin, sur les rives du canal de la Marne, à proximité de la commune de Choilley-Dardenay (canton de Prauthoy).
Menu larcin et lourdes conséquences
«Nous avons décidé de partir avec deux vélos, une tente, des couvertures, quelques vêtements et un peu d’argent, soulignait Neville Livingston, coiffé d’un bonnet aux couleurs du drapeau éthiopien. Nous avons été aidés par de nombreuses personnes sur notre chemin, mais nous n’avions plus rien. Nous avons longé le canal et découvert une maison abandonnée. La porte était ouverte, il y a avait du désordre à l’intérieur…» La suite ? Anecdotique pour les prévenus et lourde de conséquences pour les services de Voies navigables de France (VNF)… Au risque de s’électrocuter, les deux pèlerins ont ouvert deux armoires électriques afin de dérober quelques câbles en cuivre. Pris sur le fait par les gendarmes, Neville Livingston et Winston Rodney n’auront pas eu l’occasion de tirer un maigre profit – estimé à 5 ou 10 euros – de leur menu larcin. Les dégradations commises par les deux prévenus auront coupé l’alimentation électrique de l’écluse N°19. Assistés par des personnels d’Electricité réseau de France (Erdf), plusieurs agents des VNF auront dû être mobilisés afin de rétablir la circulation fluviale.
A ces faits de vol en réunion s’est ajoutée l’accusation de séjour irrégulier sur le territoire français. Après avoir pris contact avec leurs homologues allemands, les autorités françaises ont pu établir l’absence de documents attestant de la régularité de leur présence en Allemagne. Ne pouvant résider ou voyager dans les pays de l’espace Schengen, les deux prévenus – condamnés à un mois de prison avec sursis pour le vol en réunion et à une interdiction de territoire immédiate – ont été conduits au centre de rétention administrative de Metz dans l’attente de leur expulsions vers leurs pays d’origine respectifs. Le périple des deux pèlerins aura pris fin à quelques mètres de la basilique Saint-Jean-Baptiste. Ainsi soit-il…