Elsa Gautherot, plus nature que jamais
Gérante de l’Herberie de la Tille, à Villemervry, depuis 2020, Elsa Gautherot vit l’existence dont elle a toujours rêvé. Proche de la nature depuis son plus jeune âge, elle revendique un mode de vie loin de la société de consommation et un quotidien qui va à l’essentiel. Une rencontre ressourçante et inspirante.
C’est un endroit hors du temps. Une respiration pour qui aime le calme et la nature, au milieu de nulle part. L’Herberie de la Tille, installée presque à califourchon entre la Haute-Marne et la Côte-d’Or, entre Villemervry et Cussey-les-Forges, c’est le contre-pied total de la société de consommation, le pied de nez au rythme effréné des vies citadines, le lieu idéal pour qui souhaite un retour aux sources. C’est aussi et surtout le coin de paradis d’Elsa Gautherot depuis avril 2020.
Originaire de Dijon, cette trentenaire, bercée par l’amour de la nature depuis ses plus jeunes années, a racheté l’herberie de Xavier Decloux et Sophie Créton peu de temps avant le Covid. « C’était comme une évidence. Ils cherchaient à se consacrer à une autre activité, à Villars-Santenoge. J’ai découvert ce lieu, ses plantes aromatiques et médicinales. Xavier m’a initiée à la cueillette, m’a formée. Et tout s’est enchaîné très vite », se souvient-elle.
Elsa Gautherot saisit sa chance, se plonge dans les livres, fait des recherches pour parfaire ses connaissances. Son BTS gestion et protection de la nature acquis quelques années plus tôt lui offre un bagage intéressant, complété par son expérience dans l’animation de projets autour du changement climatique et de la transition écologique. Son choix de s’établir en pleine campagne, loin de tout, n’est pas le fruit du hasard.
Chanvre, paille, panneaux solaires et source naturelle
Son mode de vie, elle le revendique. « Ce n’est d’ailleurs pas un mode de vie. C’est un rêve que j’ai réalisé, corrige-t-elle. L’idée de prendre la voiture chaque matin pour aller au boulot, d’avoir une vie ancrée dans la société de consommation, ça m’a toujours révulsée. J’ai aussi décidé de bannir l’avion. J’essaie de vivre en ayant moins d’impact possible sur l’environnement ou la qualité de l’eau. Mon souhait, c’est de retrouver les vrais besoins, primaires, essentiels ».
Dans sa maison à ossature bois, isolée grâce au chanvre et à la paille notamment, pas de raccordement ni au réseau d’électricité, ni au réseau d’eau. Elsa Gautherot a fait installer quelques panneaux solaires qui suffisent à sa consommation. Pas de frigo, pas de lave-linge. L’eau provient de la source voisine et d’une citerne, en cas de sécheresse. Le poêle à bois chauffe la petite surface d’habitation et un gilet pallie, au besoin, les quelques degrés manquants. « Je suis heureuse avec ce que j’ai », assure-t-elle. « Je ne me sens pas brimée et je suis en adéquation avec ma conscience personnelle, loin des propos culpabilisants qu’on nous assène », poursuit-elle, en caressant son chat venu se percher sur son épaule.
Avec l’Herberie de la Tille, Elsa Gautherot a trouvé de nouvelles pièces qui assembler le puzzle de sa vie. Elle qui a toujours privilégié les soins naturels défend au quotidien ses convictions les plus profondes. Et c’est avec une passion qu’on sent chevillée au corps qu’elle cultive et fait visiter les 3 000 m2 de son jardin. Au total, la jeune femme propose une vingtaine de plantes différentes, une dizaine issues de sa culture – sauge, ortie, basilic, menthe, thym, sarriette… -, une dizaine récoltées en cueillette sauvage dans les environs.
Si elle se réjouit de voir la population nourrir un intérêt croissant pour les médecines douces, elle peine toutefois à accepter les obligations fixées par la loi. En France, la vente de plantes médicinales inscrites à la pharmacopée est réservée aux pharmaciens. Seules 148 espèces sont autorisées en vente libre sur les plusieurs milliers existantes.
Poules, potager… Des incontournables !
Dans sa boutique, Elsa Gautherot doit donc se résoudre à ne proposer que des références autorisées. Et là encore, la jeune femme agit selon ses convictions. De la culture sur son terrain en pente, arrosé naturellement par la source située au-dessus, au séchage, dans un séchoir naturel, « sans ventilateur ni déshumidificateur artificiel », ses plantes sont chouchoutées. Elle ouvre un sac de primevères officinales – communément appelées « coucous » – séchées il y a un an. La couleur jaune est intacte, les tiges parfaitement préservées. « Avec le soin que j’apporte, leur conservation est garantie pendant plusieurs années », fait-elle remarquer.
D’ici la fin du mois, Elsa Gautherot va débuter les semis. La serre est faite maison, la cabane à outils attenante est fabriquée entièrement à la main par les anciens propriétaires. De l’autre côté, ses poules alimentent sa consommation en œufs et son potager n’attend que le retour des beaux jours pour nourrir le foyer dès cet été. Avec son compagnon, paysagiste de métier, la jeune femme attend l’arrivée d’un heureux événement pour juillet. Petite entorse dans son mode de vie, le couple a consenti à investir dans un lave-linge. Qui pourrait en effet fort bien s’intégrer rapidement dans la liste de ses produits essentiels.
Delphine Catalifaud
Bientôt des stages de cueillette
A partir de fin mai, en juin et juillet, Elsa Gautherot a pour habitude de mettre en place des demi-journées (ou journées selon la météo) de bénévolat pour l’aider à cueillir les plantes dans son jardin. En échange, elle propose aux stagiaires de leur apprendre à cueillir, à identifier et à sécher les plantes. « Je leur montrerai aussi comment bien les utiliser », complète-t-elle. Dans son « rond de sorcière », elle présentera également les plantes toxiques que l’on peut rencontrer en Haute-Marne.