Tir à la corde – L’édito de Patrice Chabanet
Le courrier adressé aux syndicats par Emmanuel Macron, dans l’épineux dossier des retraites, a valeur de fin de non-recevoir. C’est le cas de le dire, le chef de l’Etat ne veut pas les recevoir comme ils le demandaient avec insistance. Chacun reste sur ses positions, transformant ce face-à-face en un tir à la corde, dans l’espoir non dissimulé que l’adversaire craquera le premier. Pour le moment, c’est le conflit qui s’installe dans la durée. Demain, nouvelles manifs, avec nouveaux décomptages et, sans doute, une participation élevée. Dialogue de sourds également au Sénat, où la gauche veut empêcher, sans s’en cacher, l’étude de l’ensemble du projet de loi, histoire de pousser le gouvernement à passer en force. Et de le discréditer.
Au-delà des déclarations des uns et des autres, deux légitimités s’affrontent, celle de ceux qui manifestent en masse, une réalité incontestable, et celle qui est sortie des urnes en 2022. Mais une fois qu’on a dit ça, on ne voit pas l’amorce d’une solution dans le conflit en cours.
Tôt ou tard, Emmanuel Macron sera bien obligé de sortir de sa posture sur l’Aventin élyséen. Certes, la Ve République l’incite à privilégier la gestion de la diplomatie et de la Défense, laissant les affaires domestiques aux bons soins de la Première ministre. Mais le dossier de la retraite dépasse maintenant largement le cadre de la politique économique. Elle ébranle toute la société et impose de facto l’entrée en piste du président de la République. Faute de quoi le balancier oscillera entre pourrissement ou radicalisation. Un danger pour la démocratie.