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Fin de vie : sujet tabou au cœur d’un ciné-débat

Les Drs Zlatev, Coulon, Graftieaux et le Pr Léon ont répondus aux questions des participants.

La fin de vie. Ces mots peuvent faire “peur” à la plupart des gens. Pourtant, il faut en parler. Un ciné-débat a eu lieu à ce sujet ce mardi 31 janvier au cinéma A l’Affiche. Le public venu nombreux a pu échanger avec des médecins. Les discussions étaient parfois vives.

Comment préparer sa fin de vie ? Cette question est parfois peu ou pas abordée, car elle peut faire peur. Parce que c’est l’inconnu, ou qu’on ne veut pas y penser. Pourtant, cela permet, dans certains cas, à la famille de ne pas devoir prendre de décisions trop difficiles.

Ce mardi 31 janvier, au cinéma A l’Affiche, avait lieu un ciné-débat sur ce thème. Le public, composé de personnes de tous les âges et notamment d’élèves de l’institut en soins infirmiers (IFSI), a pu regarder le film israélien “Fin de partie” de Shanon Maymon et de Tal Granit sorti en 2014.

L’histoire est “simple”. Dans une maison de retraite, un groupe d’amis voit l’un des leur souffrir d’une grave maladie. Celui-ci demande de l’aide pour mourir. Un de ses plus proches amis, Ezéchiel, va alors créer une machine pour “l’aider à partir en paix”. Mais très vite, la nouvelle de cette invention se répand et le groupe d’amis va être sollicité pour aider d’autres malades.

De vives réactions sur la fin de vie

A la fin de la diffusion, quatre médecins ont pris place pour lancer le débat. Il a été animé par Amandine Andruchiw et par Lise Nolson du CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé) et de l’EREGE (l’Espace de réflexion éthique Grand Est)

« Nous venons solliciter vos réactions sur la fin de vie », explique le Professeur Alain Léon, anesthésiste-réanimateur et directeur du site Champagne-Ardenne de l’EREGE. Il était accompagné du Docteur Jean-Pierre Graftieaux, anesthésiste-réanimateur, docteur en philosophie pratique et membre du Conseil d’orientation de l’EREGE, du Docteur Carole Coulon, médecin de l’équipe mobile de soins palliatifs et du Docteur Lyuobomir Zlatev, docteur en médecine et en chirurgie dentaire et membre de l’association SIAN.

Les premières réactions ne se font pas attendre. « Est-ce qu’en soins palliatifs, il est possible de détecter la douleur et de l’éviter ? », demande une élève de l’IFSI. « Nous pouvons soulager le patient, mais si cela n’est pas possible, nous décidons de l’endormir », répond le Docteur Carole Coulon. “Endormir” signifie garder le patient en vie, mais le placer en sédation profonde qui continue possiblement jusqu’à son décès. « Le traitement de la douleur est primordial pour tous les patients », ajoute le Professeur Alain Léon.

Claude Hury, présidente de l’association “Ultime Liberté” militante pour le droit au suicide assisté en France, a montré l’absence de représentation du monde médical dans ce film. « Les amis font tout par eux-mêmes. Les médecins sont complètement hors de la boucle. Pourquoi en France l’euthanasie est-elle interdite alors qu’en Belgique non ? » Elle est légalisée depuis 2002 pour les adultes et depuis 2014 pour les mineurs.

Claude Hury de l’association Ultime Liberté était présente à ce ciné-débat.

L’euthanasie est considérée comme un meurtre

A savoir qu’en France, l’euthanasie est considérée comme un meurtre. « En Belgique, c’est le médecin qui accompagne le patient. Parfois sur plusieurs années. Tout est minutieusement déclaré, contrairement à la Suisse. En Hollande, depuis la légalisation de l’aide à mourir, il y a eu des dérives avec une forte augmentation de patients décédés », souligne le Professeur Alain Léon.

« En 2021, une étude a été réalisée sur les médecins en soins palliatifs. 30% sont pour le suicide assisté et 2% sont pour l’euthanasie. Ce qui est quand même très peu », détaille le Docteur Carole Coulon.

 « On a tendance à ne pas vouloir entendre ces demandes », déclare une autre étudiante infirmière avant d’ajouter. « Si la personne à toute sa tête, elle n’a pas le droit de mourir, cependant elle peut changer de sexe et/ou de nom, mais elle n’est pas digne de choisir sa mort. » Le public a applaudi ces derniers propos.

Amandine Andruchiw et Lise Nolson ont animé le ciné-débat.

Ehpad et soins palliatifs

« La mort n’est pas une urgence absolue. Demander l’euthanasie n’est pas forcément mourir, c’est plus pour soulager les douleurs », selon le Professeur Alain Léon. « La sédation profonde est très mal connue par le milieu médical », complète le Docteur Carole Coulon.

Le Docteur Graftieaux, rappelle que dans le film il y a deux situations distinctes. Un cas ou le patient est très malade et un autre où c’est une personne touchée par la démence qui ne souhaite pas se voir dépérir. « Pour la première, la loi Leonetti * serait envisagée en France, pour l’autre, nous tombons dans le cas du suicide des personnes âgées. C’est un angle mort de la barbarie. »

Un homme dans le public a partagé l’histoire d’une proche décédée à 88 ans en Ehpad, quelques jours auparavant. « Elle a beaucoup souffert pendant plusieurs jours. Elle est morte sans eau, ni nourriture en Saône-et-Loire.  La bienveillance des soins palliatifs est une blague à mon sens. »

« Ma belle-mère a été chez Orpéa pendant 4 ans et je n’ai rien à redire sur eux à titre personnel », explique le Professeur Léon. « Nous avons beaucoup de progrès à faire, c’est une réalité. Nous sommes parfois dans des situations précaire », souligne le Docteur Carole Coulon. Une directrice d’Ehpad présente dans la salle intime d’éviter les généralités. « Nous travaillons beaucoup avec les soins palliatifs et ils ont toujours été bienveillants avec les patients. »

Les participants pouvaient remplir un bulletin de satisfaction sur cette soirée.

Les directives anticipées

Le dernier point abordé : les directives anticipées. Ce document écrit, daté et signé permet de rédiger ses volontés quant aux soins médicaux qu’un patient souhaite recevoir ou non dans le cas où il serait devenu inconscient ou dans l’incapacité d’exprimer sa volonté. Pour une dame de 82 ans, les échanges de la soirée ne l’ont pas du tout rassurée. « Je suis venue avec une angoisse que mes demandes ne soient pas respectées et je vais repartir avec. Vous faites tout pour faire changer d’avis les patients. Ce n’est pas normal. »

Le Docteur Carole Coulon indique que « Les directives anticipées sont méconnues par beaucoup de monde. Si elles sont rédigées par la famille, on ne peut pas être sûrs que ce sont celles du patient. Donc nous faisons très attention. »

Pour Claude Hury, le médecin garde le dernier mot car, en bas de page des directives anticipées, il est stipulé qu’en cas d’urgence vitale, le médecin peut ne pas les mettre en œuvre pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation. Il en va de même dans le cas où les directives paraissent manifestement inappropriées ou non-conformes à la situation médicale le médecin du patient.

Caroline M.Dermy

c.dermy@jhm.fr

  • La loi Leonetti est relative aux droits des malades et à la fin de vie. Elle interdit l’acharnement thérapeutique (l’obstination déraisonnable), mais n’autorise pas l’euthanasie, ni active, ni passive. Tout patient est en droit de considérer qu’un traitement constitue pour lui une obstination déraisonnable et peut le refuser, même si ce refus peut avoir des conséquences vitales.

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