Saint-Dizier, un berceau français du bowling
La brasserie Georges est l’un des haut-lieux de la restauration à Lyon. L’établissement, fondé en 1836, a compté, parmi ses habitués et ses clients de passage, Lamartine, Verlaine, Jules Verne, Zola, Rodin, Brel, Hemingway… Pourquoi en parler ici ? Parce que début 1909, la brasserie attendait la livraison de deux allées de 20 mètres d’un tout nouveau jeu apparu en France : un bowling. Des installations fabriquées à Saint-Dizier.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas avec le Corps expéditionnaire américain, à la fin de la Première Guerre mondiale, que le bowling est apparu en France, mais bien avant le conflit, en 1907, par l’intermédiaire d’une société américaine toujours en activité, Brunswick.
De la queue de billard au bowling
Fondée par un immigré suisse, la firme possédait des établissements à New York, Cincinnati, Muskogeon, San Francisco et Toronto, et un seul hors du continent américain : dans la cité bragarde. A l’origine, le site haut-marnais de la Compagnie Brunswick française, branche hexagonale de la société américaine, fabriquait des queues de billard. Il était implanté rue (puis avenue) de Bar-le-Duc (actuelle avenue du Général-Sarrail).
Les produits issus de la scierie bragarde étaient renommés. Lors d’une exposition industrielle, à Nancy en 1909, Brunswick était en effet présentée comme le plus important fabricant de billards en Europe. Le catalogue précisait alors que l’usine produisait, chaque année, douze millions de procédés de queues de billard et 24 000 queues de billard.
En outre, et c’est ce que nous intéresse ici, la société « construit le fameux jeu de bowling (quilles de précision) qui fait fureur en France depuis deux ans ». Une publicité, en 1908, insistait d’ailleurs sur le caractère pionnier du bowling Brunswick, « le fameux jeu de quille de haute précision, le plus entraînant de tous les sports, seul concessionnaire des brevets et fabricants en Europe ».
Hôpital militaire
Primée à l’exposition de Bruxelles en 1910, la société, qui possédait une autre usine à Clichy, a notamment produit un billard sur lequel un célèbre joueur, Louis Curé, professeur à l’Académie de l’Olympia, a battu « le record du monde au cadre de 45 à deux coups », en février 1911, « fantastique prouesse » saluée par la presse.
L’activité de la scierie bragarde Les Billards Brunswick, toujours attestée en 1911, semble avoir cessé avant la Première Guerre mondiale, puisque rapidement, en novembre 1914, le site se transforme en hôpital pour blessés, l’hôpital complémentaire n°41, d’ailleurs connu sous le nom d’hôpital temporaire… Brunswick.
Ses locaux seront ensuite occupés par l’usine La France, selon le chanoine Petit.
L. F.