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Fronts mouvants – L’édito de Christophe Bonnefoy

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Les crises sociales ne sont plus ce qu’elles étaient. Il y a longtemps… très longtemps… presque une éternité, la mécanique était d’une extrême simplicité. La colère montait de la base. Du “peuple”. Les syndicats s’en emparaient et coordonnaient. Puis la rue manifestait. Et obtenait gain de cause. Ou pas. Mais au moins, même dans la contestation, les choses demeuraient-elles cadrées. D’une certaine manière, plus prévisibles pour ceux qui nous dirigent. Et moins difficilement gérables.

Aujourd’hui, un gouvernement n’a plus à affronter les seuls syndicats, même s’ils restent en apparence les interlocuteurs officiels. On le voit ces jours-ci dans le cadre de la réforme des retraites. Autrement dit, le danger peut venir de partout.

Pour preuve, la naissance du mouvement des Gilets jaunes en 2018. Insolite, dans la manière de contester et compliqué à appréhender, par l’absence de réels leaders, et donc de négociateurs potentiels. Plus proche de nous, la grève à la SNCF en décembre a montré qu’une minorité pouvait s’affranchir d’un front syndical et réussir à bloquer un pays. Sur les retraites, précisément, les sondages d’opinion montrent que les Français sont dans le refus, là où les syndicats semblent prêts à lâcher un peu de lest.

C’est toute la difficulté d’Emmanuel Macron en cette année naissante : anticiper l’incendie. Et pour ce faire, identifier le lieu du départ de feu. Les lieux plutôt, tant ils semblent nombreux. Qui aurait ainsi pu imaginer que la détresse des boulangers deviendrait un possible et dangereux foyer de contestation ? Voilà pourtant une profession dont chaque Français se sent proche. Et à laquelle il s’identifie logiquement. En toute logique, la colère pourrait ainsi s’étendre à bien d’autres catégories professionnelles. Et devenir ingérable.

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