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Une scolaire au tableau

Pauvreté et scolarité, un défi à relever au quotidien à Saint-Dizier

Une scolaire au tableau
Souvent, les élèves en difficulté ne sont pas accompagnés chez eux pour faire leurs devoirs. Photo Nicolas Frisé.

SOCIÉTÉ. Le territoire de Saint-Dizier affiche un taux de pauvreté de 25 %, selon les chiffres de l’Insee. Forcément, cela se ressent dans les établissements scolaires, où le taux de réussite de l’enfant s’avère globalement en corrélation avec la situation sociale de la famille.

Le 7 novembre, le centre socioculturel proposait une conférence sur le thème “ce que la pauvreté fait à l’école”. Dans la salle, beaucoup de personnes issues de l’enseignement étaient venues écouter Jean-Paul Delahaye, qui a connu la pauvreté, a réussi l’Ecole normale, puis est devenu directeur général de l’enseignement scolaire et a écrit un rapport très repris depuis. Nul doute que la problématique les a intéressés, eux qui travaillent dans un territoire où, selon l’Insee, le taux de pauvreté atteint les 25 % de la population. Et où des écoles sont intégrées au Réseau d’éducation prioritaire (REP) et prioritaire + (REP +), reflet de « difficultés sociales significatives ».

Justement, comment le personnel scolaire appréhende-t-il cette situation, au quotidien ? Un enseignant en élémentaire a accepté de nous répondre sous couvert d’anonymat, un fonctionnaire étant soumis au devoir de réserve.

JHM quotidien : Percevez-vous les différences sociales chez les enfants ?

L’enseignant : On remarque l’inégalité dès la rentrée à la maternelle. Les élèves d’un milieu plus favorisé viennent avec un bagage langagier, en petite section. L’écart se creuse d’années en années. Ces élèves ont accès aux livres, lisent, ont un bon niveau de lecture. Les autres ne lisent pas chez eux. Il y a l’attitude en classe aussi, les enfants favorisés possèdent les codes sociaux, les règles de politesse. Les élèves moins favorisés ont plus recours à la violence, du fait qu’ils n’ont pas ce lien avec le langage. Disposant de moins de mots, donc moins d’outils verbaux pour se défendre en cas d’insultes, ils ont plus recours à la violence.

JHM : Comment se passent les relations entre scolaires ?

E. : Il n’y a pas de clan, les relations sont bonnes à ce stade d’âge.

JHM : Les élèves, issus de familles pauvres, se rendent-ils compte du décalage avec leurs camarades ?

E. : Non, en primaire, leur cocon familial, c’est la normalité. Ils ne s’en rendent pas compte mais ça viendra au collège.

JHM : Concernant le matériel, les fournitures, vous en tenez-vous au strict nécessaire ?

E. : On n’a pas ce genre de problèmes. Une bonne partie des fournitures est payée par la Ville de Saint-Dizier, la plupart des classes ont déjà pas mal de matériel. Un vieux tablier, on trouve toujours ça dans un placard.

JHM : Et pour les sorties ?

E. : Beaucoup de projets sont pris en charge et il y a une coopérative scolaire. Les inégalités ne se reflètent pas dans les sorties. En plus, dans les écoles des quartiers dévaforisés, qui sont en REP et REP +, elles reçoivent plus de dotations, ce qui permet les sorties. Globalement, les écoles sont bien loties et la mairie nous propose des activités artistiques, comme avec l’exposition Résonances. 

JHM : Des choses sont-elles mises en place pour aider à la réussite scolaire ?

E. : Dans toutes les écoles maternelles et primaires, on a instauré l’activité pédagogique complémentaire, souvent utilisée comme du soutien, à raison d’une heure par semaine. C’est sûr que c’est très peu pour les élèves en difficulté. Il y a aussi la garderie, de 7 h 30 à 8 h 30 et de 16 h 30 à 17 h 30, avec une gestion des enfants effectuée par le personnel de la mairie.

JHM : L’étude, qui durait une heure après la fin des cours, où l’on faisait nos devoirs avec un professeur, n’existe plus ?

E. : Non, ça ne se fait plus et ça pourrait être utile pour certains gamins. En REP, il y a tout de même 30 % d’effectifs en plus pour l’encadrement, et des professeurs spécialisés travaillent en groupe avec des élèves en difficulté. Mais c’est sur un temps précis et c’est pris sur le temps de la classe.

JHM : En tant qu’enseignant, comment vivez-vous ces inégalités ?

E. : Ca dépend des professeurs. Globalement, la majorité aide les élèves en difficulté mais c’est très chronophage. Comme ils partent au bout d’une année, on a du mal à voir si notre travail leur a permis de réussir. Il y a des évaluations en CP, en CE1 et à l’entrée en sixième. A Saint-Dizier, le niveau des écoles est assez bas.

Propos recueillis par Marie-Hélène Degaugue

mh.degaugue@a-guiguejhm-fr

Impensable pour certains d’étudier ailleurs

Après l’école, c’est l’étape du collège, un moment délicat. Alors, les établissements scolaires sont attentifs à la composition des classes. « Il n’est pas question de faire une classe ghetto, il y a une commission d’harmonisation avec des enseignants ou des directeurs d’école. On cible les difficultés pédagogiques des élèves et on équilibre chaque classe avec tous les niveaux », précise Jean-François Veidmann, le principal du collège de La Noue.

Des enfants dans une classe
Des aides à la cantine ou pour les voyages peuvent être accordées, afin de faciliter la vie au collège.

Si la structure n’est pas en zone REP, elle compte « 58 % de catégorie socioprofessionnelle défavorisée ». Pour autant, il n’y aurait pas de relation directe entre la pauvreté et la réussite scolaire. « C’est tout un contexte qui conduit aux difficultés scolaires. Les parents n’ont pas le permis, ils habitent à Saint-Dizier, alors ils veulent que leurs enfants fassent leurs études à Saint-Dizier. Peu d’enfants ont envie de faire des études ailleurs, ils ont leurs copains, leurs habitudes. Il n’y a pas d’ouverture vers l’extérieur », explique le fonctionnaire.

Une absence de mobilité constatée par Caroline Duhalde, la principale du collège Ortiz, classé en REP et composé de 60 % de boursiers : « C’est difficile de les faire aller vers une formation hors de Saint-Dizier, même prendre le bus pour le lycée de Wassy ça pose problème ». 

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Afin de susciter des vocations et donner envie d’étudier, des dispositifs d’aide scolaire ont été mis en place comme l’aide aux devoirs ou le dédoublement d’une heure de cours. L’élève se rend dans une salle dédiée à n’importe quel moment, un enseignant ou un assistant pédagogique l’accompagne.«  C’est basé sur le volontariat, mais après le premier conseil de classe, on incite fortement les élèves en difficulté à y participer », reconnaissent les deux principaux.

A la fin de la troisième, dans ces deux collèges, 60 % des élèves se dirigent vers le lycée général et 40 % optent pour une filière professionnelle. Selon Caroline Duhalde, « un choix pour 95 % des élèves », certes dicté par les résultats scolaires. Désormais, l’Education nationale permet de tester ces deux voies en seconde, pour un avenir meilleur.

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