Eviter la coagulation – L’édito de Patrice Chabanet
La grève des raffineries s’inscrit désormais dans un cadre plus large. Elle ne peut plus être détachée d’une date fatidique, celle de la grève interprofessionnelle de mardi. C’est elle qui a donné l’impulsion. C’est elle qui tente de se renforcer à travers un mouvement qui touchera, entre autres, la SNCF, les transports et l’enseignement. Les syndicats qui l’orchestrent, la CGT, FO, Solidaires et FSU jouent gros. Le souhait de certains, ils s’en cachent à peine, est de provoquer une grève générale. Un souhait n’est pas une certitude : l’avènement du grand soir est un grand classique de la vie sociale française.
A y regarder de près, on ne voit pas apparaître un bloc monolithique. Ainsi la raffinerie a repris le travail à Fos-sur-Mer. Mais beaucoup dépendra des négociations qui ont commencé la nuit dernière chez Total. On imagine sans peine que la pression gouvernementale doit être à son maximum sur le géant pétrolier. Ses fortes marges bénéficiaires le contraignent à lâcher du lest, surtout quand une myriade d’entreprises ont commencé à négocier avec les syndicats et à concéder des augmentations de salaires ou des primes qui tangentent parfois l’équivalent d’un treizième mois.
Si d’aventure et c’en est une, un accord était trouvé avant la grande marche contre la vie chère de dimanche et la grève de mardi l’effet démobilisation jouerait un rôle indéniable. C’est sans doute le rêve secret de l’exécutif. Le téléphone du PDG de Total, Patrick Pouyanné, doit recevoir des appels pressants de l’Elysée et de Matignon pour qu’il se fasse violence et qu’il déverrouille la situation. La dimension politique enveloppe l’enjeu social.