Walerian Loyon : métier docteur du patrimoine (et Dr langrois)
Conservateur restaurateur du patrimoine, quel drôle de nom. En réalité, l’intitulé du métier de Walerian Loyon est précis pour être différencié de celui de conservateur de musée. À sa différence, le jeune homme intervient sur des œuvres précieuses. Walerian est Langrois.
« Je suis spécialiste en processus de dégradation et en actes d’intervention ». Au terme de cinq ans d’études, licence de l’art et archéologie et master de conservateur restaurateur du patrimoine en poche en 2018, Walerian Loyon entre dans la carrière, spécialisé en sculpture (statuaires, objets liturgiques, bas-relief…). « Nous avons tous un domaine d’intervention bien précis -peinture, mobilier, textile… et nous n’empiétons pas sur d’autres ». Son métier est une rareté : en France, il existe trois écoles (Paris, Saint-Denis, Tours) pour s’y former – et dans sa promotion sculpture, ils étaient… trois. Walerian est diplômé de Paris I Panthéon Sorbonne. Les amours du jeune Franc-Comtois l’ont amené, il y a trois ans, à vivre dans la cité des remparts où il a domicilié son entreprise individuelle, en mai dernier. La cité perchée parle naturellement à sa « sensibilité » à l’art et à l’archéologie. « D’autant qu’il y a un musée assez intéressant ».
Né « un peu » dans le chaudron
« J’aimais bricoler, ce métier me permet à la fois d’utiliser la théorie et la pratique – tant des outils que des techniques et des œuvres ». Alors, c’est vrai que l’inclination de Walerian pour l’art a pu être facilitée : « j’avais un petit peu le pied dans le métier ». En effet, il a un oncle professeur à Paris I Panthéon Sorbonne. Reste que c’est avant tout l’archéologie qui l’a séduit, et dès « tout petit ». Sachant que son père ne risquait pas de s’y opposer puisqu’il avait lui-même fait des chantiers archéologiques, par passion. Il y a aussi un deuxième oncle « très axé sur l’histoire », qui évolue dans le monde des antiquaires.
« Je ne rêve pas d’intervenir sur un Rodin »
« Je ne rêve pas d’intervenir sur un Rodin. Je trouve autant d’intérêt à mon métier en me penchant sur une petite œuvre polychrome nichée dans une église ». Le sel de la profession de conservateur restaurateur, poursuit Walerian, c’est « la technique » qui va bien pour sauver une œuvre. « Plus on avance dans le métier, plus on constate que la manière de faire est le plus passionnant ». En « provincial », Walerian sait l’enjeu de la préservation du petit patrimoine. « C’est un peu l’âme des petites communes, c’est notre bien à tous, qui résonne d’autant plus en nous qu’il fait partie de notre quotidien commun ». Le jeune professionnel espère pouvoir travailler en Haute-Marne, et précisément autour de Langres, il a reçu de premières sollicitations. Ce sera plus commode quand il aura mis la main sur l’atelier qu’il recherche dans la cité perchée -25 à 30 m2 lui suffiraient.
« Mon métier ne ressemble à aucun autre »
« Mon métier ne ressemble à aucun autre. Les équations à résoudre changent car chaque œuvre est unique ». Walerian est aussi amené à faire des rencontres et « la relation humaine compte beaucoup » dans son métier. Sans compter qu’il travaille « dans de beaux lieux, et parfois insolites ». Hier mardi 27 septembre, le jeune Langrois était… au Bourget à intervenir en équipe sur la fontaine Stravinsky de Niki de Saint-Phalle – habituellement située près de Beaubourg- qui a été démantelée pour être déposée « au milieu des carcasses des vieux avions », un site bluffant. D’autant que « le coeur du métier, c’est plutôt les oeuvres anciennes ». Et puis Walerian est « libre », comme la grande majorité de ses homologues, « 80% sont indépendants », estime-t-il. « Même si l’on reste jugés par nos pairs, on fait ses propres choix » -les options stratégiques pour entamer une restauration. Maître de la solution, maître du destin d’une oeuvre, médecin du patrimoine.
Fabienne Ausserre
f.ausserre@jhm.fr