Devoir de mémoire – l’édito de Patrice Chabanet
Revisiter le passé de l’Algérie tient de la gageure, et même de la mission impossible. Les plaies sont encore vives. Et des tabous demeurent. Emmanuel Macron, qui est né bien après le conflit, a décidé de passer outre cet impressionnant mur de la méfiance et de la défiance. Il a annoncé la création d’une commission mixte d’historiens sur la colonisation. Sa mission ira bien au-delà de « la guerre d’Algérie ». Le fil sera tiré jusqu’au début de la colonisation qui ne fut pas une aimable promenade civilisatrice. Les « enfumades » des populations autochtones ont laissé des traces dans le bled. L’ouverture des archives devrait permettre d’y voir un peu plus clair. Mais des résistances sont à prévoir.
Pour autant, la France n’a pas à battre sa coulpe en toutes circonstances. Elle a déjà reconnu l’usage de la torture, officiellement pour débusquer les poseurs de bombes. Elle a construit les infrastructures de tout un pays qui en font l’une des nations les plus développées de l’Afrique.
A l’inverse, l’Algérie s’est enfermée dans un récit mémoriel trop flatteur pour être vrai. En atteste, entre autres, l’omerta sur le massacre de centaines d’Européens et d’Algériens attachés à la France à Oran. C’était quelques jours après la proclamation de l’indépendance en juillet 1962. Sans parler de tous les réglements de comptes sur l’ensemble du territoire. On connaît le résultat de cette guerre sale.
L’indépendance de l’Algérie n’a jamais débouché sur l’avènement d’une véritable démocratie. Clin d’œil de l’Histoire : la diaspora algérienne passe par la France, l’ancienne puissance coloniale pour réclamer davantage de liberté. Un désaveu cinglant pour les tenants d’une Histoire officielle.