A la Maison Laurentine, on réinvente le langage
Une soirée d’expérimentation poétique a été organisée à Châteauvillain, mardi 23 août, par Catherine Broskowitz, dans le cadre de sa résidence à la Maison Laurentine. Dix personnes y ont participé dans les locaux de l’EXPEdition, sur le site de l’ancienne usine Le Chameau.
Autrice, metteuse en scène et plasticienne, Catherine Broskowitz a été sélectionnée pour l’écriture de sa nouvelle pièce, intitulée “Le Cheval de Toussaint Louverture” : un dialogue imaginaire entre le chef de la révolution haïtienne et son “homologue” français, Maximilien Robespierre (les deux ne s’étant jamais rencontrés). Le public castelvillanois avait assisté à une présentation de l’ébauche de cette pièce le 1er mai, lors d’une journée consacrée à la Révolution. Un thème de prédilection chez cette artiste inspirée, qui se nourrit autant de ses rencontres (elle a travaillé dans plusieurs pays d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Amérique du Sud) que de ses lectures, qui la conduisent très souvent à expérimenter de nouveaux supports de création (enregistrements sonores, dessins, créations plastiques, vidéos), avec les habitants eux-mêmes. Ainsi mardi soir, elle a proposé à ses invités (Béatrice, Dominique, Françoise, Marie-Solange, Aurélie, Guy, Idir, Guillaume et Pierre) de participer à un travail d’écriture inspiré du “cut-up” de William Burroughs. Tout est parti d’une discussion préalable entre Catherine et Pierre Bongiovanni, de la Laurentine, et d’un constat portant sur le langage contemporain, notamment celui des politiques, qui semble avoir perdu de l’éclat : les mots sonnent creux, les formules toutes faites sont interchangeables. « Le discours politique s’est considérablement appauvri » et sature pourtant l’espace médiatique à tel point qu’il en devient inaudible. Pourquoi ne pas tenter alors de réinventer ce langage ? Ainsi le groupe a été initié à la pratique du cut-up, qui consiste à découper des textes, à les mélanger à d’autres, à les hybrider pour en faire quelque chose de nouveau et ouvert à d’autres dimensions. En partant de textes personnels, composés pour l’occasion, puis en les associant de façon aléatoire à des discours politiques de tous bords, sélectionnés par Catherine Broskowitz, les apprentis poètes ont créé librement. Chaque intervenant a ensuite lu à haute voix son texte suscitant tantôt l’étonnement tantôt le rire. La prose d’Idir, qui est un acteur-né, a charmé l’assemblée, tandis que le signifiant modifié des discours de Dominique, Béatrice ou Guillaume ouvrait d’autres horizons insoupçonnés, parfois surréalistes ou au contraire ancrés dans la réalité, riche d’un nouveau sens. Cette expérimentation a permis de se réapproprier le langage. « Une aventure passionnante, ludique et jouissive », d’après Aurélie, « Un chouette moment, merci Catherine », a ajouté Béatrice.