Boualem, le producteur de raï sacralisé par DJ Snake

TRIANGLE. Le Barisien Boualem Benhaoua sera au Parc des Princes ce samedi soir pour le concert événement de DJ Snake. Le producteur de musique, pionnier de l’internationalisation du raï, s’est confié sur sa carrière et son rôle dans « Disco Maghreb », dernier titre phare du DJ français.

jhm quotidien : Vous êtes en lumière les 40 premières secondes du clip de « Disco Maghreb » de DJ Snake, qui se produit ce samedi soir au Parc des Princes. Pouvez-vous nous raconter comment s’est déroulée votre rencontre ?

Boualem Benhaoua : DJ Snake nous a demandé il y a trois mois l’autorisation d’utiliser « Disco Maghreb », le magasin que l’on a à Oran, pour son titre et du coup, le filmer pour le clip. On lui a ouvert les portes du magasin, c’était son souhait. On venait seulement de faire connaissance avec lui. Quand il était jeune, il écoutait beaucoup la musique raï, il a grandi avec ça.

jhm q : Car « Disco Maghreb », titre de son tube, c’est votre magasin ainsi qu’un label ?

B. B. : Oui, Disco Maghreb est une maison de production et le magasin, dans lequel on a créé le label (éponyme, ndlr). Tous les chanteurs passaient par Disco Maghreb, dans les années 80 et 90 : Cheb Hasni, Khaled, Cheb Mami, Zahouania, Djenat… ils passaient tous par là.

jhm q : Au début du clip, on vous voit ouvrir les grilles du magasin puis réactiver le compteur comme s’il était fermé depuis longtemps.

B. B. : Oui, il est fermé depuis 2005. Il est resté comme il était, plein de cassettes, de CD. Avec le piratage (de la musique et internet, ndlr), on ne pouvait plus continuer. C’est à cause de ça qu’on a fermé et on l’a laissé comme ça. Pour le clip, je n’avais même plus les clés, je les ai perdues. On a appelé un soudeur ! La scène du clip est authentique : je reviens dans le magasin pour la première fois depuis la fermeture. 

jhm q : Quel est votre sentiment en voyant votre échoppe en vedette dans un clip déjà vu 20 millions de fois ?

B. B. : Moi, ça m’a fait un grand plaisir. En plus, DJ Snake a rendu hommage a l’Edition Disco Maghreb. C’est un beau travail, ça fait du bien.

jhm q : Vous habitez encore Bar-le-Duc. Vous avez aussi de la famille à Saint-Dizier. Pouvez-vous nous parler de vos attaches locales ?

B. B. : Après l’Edition (le nom complet du magasin est Edition Disco Maghreb, ndlr), je me suis associé avec quelqu’un à Bar-le-Duc, on faisait du commerce (de l’import-export dans le prêt-à-porter, ndlr), on travaillait avec l’Algérie. Je suis tout le temps à Bar-le-Duc, mais aussi à Oran, Marseille ou Paris. Je bouge beaucoup. Saint-Dizier, je connais très bien, depuis les années 1975, j’y viens. J’y ai toujours de la famille.

Nicolas Frisé

n.frise@jhm.fr

« Disco Maghreb rend ses lettres de noblesse au raï »

Disco Maghreb est né en 1980. C’est au milieu de ces années que le raï prend de l’ampleur en France, puis à l’étranger. Le magasin de Boualem passe sous le feu des projecteurs de plusieurs médias à l’époque. « Dans les années 1983, 1984, la chaîne anglaise BBC est venue faire des interviews au magasin, TF1 également. Tous les médias s’intéressaient à nous », se souvient Boualem.

Tarik El Kebir, qui collabore depuis 30 ans avec Boualem et gère la continuité de son œuvre sur quelque 250 plateformes, dit de lui qu’il est « le père de l’internationalisation de la musique raï, un découvreur de talents ». Pour lui, le titre « Disco Maghreb » « rend ses lettres de noblesse à la culture musicale algérienne d’une manière générale et le raï en particulier ». Tarik El Kebir compter « surfer sur la vague de DJ Snake » pour se relancer dans l’enregistrement et la production. Faire revivre le label algérien comme à la grande époque.

Invité mercredi 8 juin de l’émission « Quotidien » sur TMC, DJ Snake a expliqué à Yann Barthès avoir voulu mettre en lumière « l’Algérie populaire, des gens qu’on ne montre jamais, du charme, de l’énergie, de la folie, de la ferveur dans ce peuple ». Pour le DJ français, qui a aussi raconté sur le plateau l’histoire de la boutique d’Oran et sa rencontre avec Boualem, Disco Maghreb est la « Motown du raï ».