Science : tous les secrets du robot qui s’est posé sur Mars
Perseverance, c’est le robot qui s’est posé sur Mars le 18 février 2021. Il va désormais explorer les roches pour déterminer s’il y a eu, un jour, de la vie sur cette planète. Michel Viso, responsable de l’exobiologie et de la vie dans l’Univers au Centre national des études spatiales de Toulouse, organisme qui a soutenu la fabrication du matériel SuperCam, répond au Journal de la Haute-Marne. Il dit tout sur cette folle aventure !
Pourquoi ce robot s’appelle-t-il Perseverance ?
La NASA, le centre spatial américain, a lancé un appel aux idées pour donner un nom au robot. « Elle a obtenu 10 à 15 000 réponses, parfois farfelues, fait remarquer Michel Viso. C’est un adolescent de 15 ans qui a proposé ce nom. Au départ, il devait être attribué au petit hélicoptère que le robot va essayer de faire voler sur Mars. Et le robot, lui, devait s’appeler Ingenuity. Il a été décidé d’inverser. Perseverance, ça colle bien avec l’histoire du robot. C’est la cinquième fois qu’on envoi un robot sur Mars. Et lui-même, pour trouver des échantillons et remplir ses missions, va devoir persévérer. »
Il a quelle taille, ce robot ?
Une voiture citadine. « Il a la taille d’une voiture, un peu plus grosse qu’une Clio, pour donner une idée. Il pèse 1,05 tonne et mesure plus de deux mètres. C’est un beau bébé, très haut sur pattes, monté sur six roues qui ressemblent aux anciennes roues de tracteur, en métal. Tout le défi a été de les construire solides et résistantes, mais en même temps légères. Le robot roule sur des roches, dont les angles sont très pointus et les arêtes tranchantes », explique Michel Viso. Le robot a été fabriqué au Jet Propulsion Laboratory, en Californie (Etats-Unis). Il possède un bras articulé de plus de deux mètres, ainsi que 23 caméras.
Combien de temps le robot va-t-il vivre sur Mars ?
Un année martienne. « C’est l’équivalent de deux années sur Terre. L’électromécanique souffre énormément car dans la même journée, il peut y avoir une différence de température de 100 degrés ! On a testé plusieurs fois tous les éléments fragiles sur Terre pour être sûrs qu’ils allaient résister », détaille le chercheur.
Va-t-il revenir sur Terre une fois ses missions terminées ?
Impossible ! « Il restera sur Mars pour l’éternité, assure Michel Viso. Mais il ne se décomposera pas car la planète Mars ne contient pas beaucoup d’oxygène. En 2026, à l’aide d’une fusée envoyée en orbite, on va récupérer les échantillons de roches que le robot aura collectés. Puis ces échantillons seront largués vers la Terre. En 2031, on espère recueillir 500 g de débris de roches. »
Quelle température fait-il sur Mars ?
Très, très froid ! « Il faut bien faire la différence entre la température du sol et celle de l’air. Celle de l’air, c’est celle calculée à 1,5 m du sol, à la hauteur de la tête d’un adolescent environ. On estime qu’elle est en moyenne de moins 67°C ! Au pôle sud, elle descend jusqu’à -135 °C et, dans le cratère où a atterri Perseverance, elle est à -20 °C. La température du sol, elle, peut aller jusqu’à +20°C. »
Y’a-t-il des jours et des nuits ?
Oui ! « Un jour, sur Mars, ne dure pas 24 heures, mais 24 h 38’35 ». La nuit, le robot fait des pauses pour recharger les batteries. Il ne possède pas de phares, mais peut-être qu’on tentera peut-être quelques expériences quand même la nuit pendant son aventure sur Mars. »
Combien de temps a t-il fallu pour fabriquer ce robot ?
Huit ans. Perseverance est le petit frère de Curiosity, envoyé sur Mars en 2021. Il a donc fallu à peu près huit ans pour le concevoir, sachant qu’il a été envoyé en juillet à bord de la fusée Atlas V, par l’agence spatiale américaine (NASA). « Il est plus moderne et plus évolué, notamment au niveau des pneus ou encore de l’ordinateur de bord », ajoute Michel Viso.
Où Perseverance s’est-il posé ?
Dans un cratère. Mais pas n’importe lequel ! Les scientifiques l’ont baptisé le cratère de Jezero. Ils estiment qu’il y a très longtemps (trois milliards et demi d’années !), il s’agissait d’un lac d’une cinquantaine de kilomètre de large. Ce cratère présente en effet des traces de circulation d’eau. Et qui dit eau dit peut-être vie. Le robot va, pour le savoir, prélever des échantillons de roches dans un périmètre de 20 à 30 kilomètres. « Chaque jour, il se déplace d’une quarantaine de mètres », précise Michel Viso.
Comment s’est-il posé sur Mars ?
Sept minutes de descente. Perseverance, qui coûte 2,5 milliards de dollars, a été expulsé d’une fusée dans une capsule. Il est entré dans l’atmosphère de Mars, à une vitesse de 20 000 km/h. Il a ainsi entamé une descente de sept minutes. Le frottement avec l’atmosphère a ralenti une première fois très fortement la vitesse de la capsule. Puis un parachute supersonique s’est ouvert et a poursuivi le travail, aidé ensuite par huit rétrofusées. A son approche de la surface rocheuse de Mars, il n’était plus qu’à 30 km/h. Trois câbles l’ont alors délicatement posé. C’est l’atterrissage le plus risqué jamais effectué !
Comment le robot transmet-il des informations à la Terre ?
Par satellite. « Perseverance envoie ses informations recueillies aux satellites qui passent au-dessus de sa tête. Ils passent environ une fois toutes les huit heures. Celui-ci réserve les infos, les stocke et les envoie ensuite sur la Terre, grâce à un réseau d’antennes, dont certaines font 70 m de diamètre ! », explique Michel Viso. Chaque matin, les chercheurs enregistreront les commandes pour la journée. A son réveil, Perseverance les exécutera automatiquement.
Quelles sont ses missions ?
Des sons, des images, des échantillons. Perseverance va récolter des échantillons de roches sur Mars pour savoir si la vie a existé un jour sur la Planète rouge. Pour la première fois, il va être capable d’enregistrer des sons, grâce à un micro fixé en haut de sa tête, qui mesure moins d’un centimètre. Il est aussi question de faire voler le premier hélicoptère interplanétaire. « C’est une démonstration technologique. Cela nous permettra de voir la capacité de vol d’un engin et de transmission d’images exploitables et inédites », raconte Michel Viso. Une dernière mission va être « de démontrer qu’on peut produire de l’oxygène à partir de gaz carbonique, tout cela dans un but futur de lancer des missions habitées ».
La France a-t-elle participé à la fabrication de Perseverance ?
Oui ! « C’est à l’IRAP (Toulouse) ainsi qu’au laboratoire américain de Los Alamos (Nouveau-Mexique) que reviennent la conception de SuperCam, un instrument doté d’une caméra, d’un micro et de trois spectromètres (analyse de la lumière) qui va permettre de déterminer à distance la composition des roches de Mars », indique Michel Viso. Plusieurs autres laboratoires ont ensuite travaillé à sa fabrication, en France, soutenus par le CNES (Centre national des études spatiales, à Toulouse), dont fait partie Michel Viso. Ce dispositif se situe tout en haut du mât du robot.
Y’aura-t-il un jour des hommes sur Mars ?
C’est envisageable. « J’adorerais même que ce soit une femme qui y pose le premier pied ! Il va y avoir beaucoup de problèmes à résoudre d’ici là et cela va demander beaucoup d’argent, mais c’est possible ! », confie Michel Viso. « Sauf qu’une mission sur Mars, ce n’est pas une mission sur la Lune. Le trajet va durer sept mois et non trois jours. Il faudra donc faire cohabiter des astronautes pendant une très longue période. Une mission durera au minimum trois ans ! Il faudra fabriquer une mini-station, pour qu’ils puissent se loger, vivre, se nourrir. On ne va pas les faire voyager dans un bidon minuscule. »