Eco Hebdo : fragilités industrielles

La pénurie en composants électroniques est l’arbuste qui cache nos fragilités industrielles, et pas seulement en France. La guerre en Ukraine est en train de mettre au jour d’autres pénuries au moins aussi inquiétantes. Celle du nickel, par exemple, un élément essentiel pour la fabrication des batteries au moment même où l’industrie automobile bascule vers le tout électrique ou la motorisation hybride.

La faute à qui ? A des managements imprévoyants ? Facile à dire, mais rien ne laissait prévoir que des sanctions à l’encontre de la Russie allaient provoquer des ruptures d’approvisionnement bien au-delà des produits énergétiques. L’urgence de la guerre impose des réactions dont le bien-fondé l’emporte sur les contre-effets et leurs impacts.

Si imprévoyance il y a, elle est générale. Elle est imputable à des choix qui privilégient les réductions de coûts à court et moyen terme, habilement présentées comme une optimisation de la rentabilité. Ainsi, dans les pays sud-méditerranéens, rien n’a été fait pour développer les cultures céréalières. Plus facile a été de se fournir auprès de la Russie et de l’Ukraine. Erreur fatale. Aujourd’hui, l’embargo fait craindre les émeutes de la faim et la déstabilisation des régimes en place.

Dans les pays développés, la menace n’est pas de cet ordre. Elle est purement économique : trouver rapidement des fournisseurs de substitution. On en trouvera, mais à des conditions qui favorisent plus l’offre que la demande. Sans parler des questions d’amour-propre : le Venezuela voué aux gémonies par les Etats-Unis est devenu tout à fait présentable en raison de ses ressources pétrolières.

Les entreprises qui ont mis tous leurs œufs dans le même panier prennent conscience, du moins on peut l’espérer, qu’il faut diversifier leurs sources d’approvisionnement. Une diversification d’autant plus difficile que, par définition, certains produits sont rares comme le cobalt, le lithium ou le tungstène. Faute de quoi, ce sont des ventes perdues, comme on l’observe dans le secteur automobile. Bref, les goulots d’étranglement demeurent un défi permanent qui peuvent surgir quand l’Histoire s’en mêle.

Patrice Chabanet