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Affaire Ghlam : l’heure du procès

Ouvert lundi 5 octobre 2020, à Paris, le procès de Sid Ahmed Ghlam pourrait permettre de lever le voile sur les circonstances exactes de la mort d’Aurélie Châtelain, le 19 avril 2015, à Villejuif. Reconnaissant avoir pris part à un projet terroriste, le Bragard conteste être à l’origine du décès de la jeune femme. Rappel des faits.

Flash-back. Dimanche 19 avril 2015, le corps d’une femme sans vie est retrouvé sur le siège passager d’un véhicule stationné à Villejuif (Val-de-Marne). La victime est rapidement identifiée. La cause de la mort ne laisse pas part au doute. Aurélie Châtelain a été tuée par balle. Agée de 32 ans, ancienne conseillère municipale, cette professeure de danse établie à Caudry (Nord) a quitté la cité de la dentelle le temps d’un week-end afin de suivre une formation à l’enseignement de la méthode Pilates. Nul ne lui connaît le moindre ennemi.

La thèse d’une mauvaise rencontre est rapidement balayée. Trois mois après les attentats de janvier 2015, la piste terroriste est privilégiée. Un lien est établi avec une intervention du Samu. Assurant « avoir été blessé par balle » à la suite d’un « vol avec arme », un homme âgé de 24 ans a alerté les secours dimanche 19 avril au matin. Sid Ahmed Ghlam est pris en charge. La police est également présente sur les lieux. Un fusil d’assaut de type Kalachnikov, trois chargeurs, un pistolet de type Sig-Sauer, un pistolet Sphinx 9 mm et un gilet pare-balles sont découverts dans une Renault Mégane utilisée par le blessé. Sid Ahmed Ghlam occupe une chambre dans une résidence universitaire située dans le XIIIe arrondissement. Trois fusils d’assaut et plusieurs centaines d’euros y sont découverts.

Qui est Sid Ahmed Ghlam ? Né en Algérie, l’intrigant a une première fois rejoint la France en 2001 à l’âge de 11 ans avant de définitivement s’y installer en 2009. La famille Ghlam est établie à Saint-Dizier. Titulaire du baccalauréat, le jeune homme intègre l’université de Reims en 2013. Professeurs et étudiants gardent de vagues et rares souvenirs de cet étudiant. Sid Ahmed Ghlam poursuit ses études en Ile-de-France à l’université Pierre-et-Marie Curie (Paris VI) à la rentrée 2014. Là encore, Sid Ahmed Ghlam se montre particulièrement discret.

Le comportement de Sid Ahmed Ghlam a pourtant déjà attiré l’attention des services de renseignement. Selon différentes sources, l’étudiant a exprimé sur les réseaux sociaux des velléités de départ en Syrie. En novembre 2014, âgé de 9 ans, le petit frère de Sid Ahmed Ghlam a par ailleurs signalé aux autorités la radicalisation de son grand frère, comme l’affirmera Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur. Sid Ahmed Ghlam avait alors été entendu par les services de renseignement. Aucun lien avec des « individus connus » des services de renseignement n’avait été établi.

Fiché S, l’étudiant a-t-il embrassé la cause islamiste à Reims ou à Paris ? Les enquêteurs portent également leur attention sur une autre ville : Saint-Dizier. Là où la famille Ghlam séjourne depuis de nombreuses années. Des perquisitions sont opérées lundi 20 avril 2015, à Saint-Dizier, aux domiciles des parents et de la sœur de Sid Ahmed Ghlam. L’affaire éclate au grand jour deux jours plus tard. A 6 h du matin, les policiers parisiens de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI) signent une arrivée remarquée à Saint-Dizier. Le pavillon n°64 situé avenue de la Cornée-Renard est occupé par Emilie Lechat-Boizumeau. La mère de famille, « récemment convertie » et « radicalisée » est suspectée d’entretenir des liens étroits avec Sid Ahmed Ghlam. Quelques heures plus tard, François Molins, procureur de la République de Paris, donne une conférence de presse. Sid Ahmed Ghlam est suspecté d’être à l’origine de la mort d’Aurélie Châtelain. Sid Ahmed Ghlam est également suspecté d’avoir projeté de commettre un attentat. L’église Saint-Cyr Sainte-Julitte de Villejuif était visée.

Les journalistes affluent à Saint-Dizier. Les langues se délient. « Mon frère n’a jamais été un extrémiste ». « C’est un homme sage. » « Il ne parlait plus aux femmes. » « Il a des mauvaises pensées. » Saint-Dizier a peur. La peur accouche de la haine. L’évêque Joseph de Metz-Noblat appellera la communauté chrétienne à « continuer à vivre normalement » et à « ne pas entrer dans le jeu des terroristes ».

Qui ? Quoi ? Où ? Comment ? Pourquoi ? Foule de questions… Au fil des jours, des éléments apparaissent quant aux activités de Sid Ahmed Ghlam lors de ses séjours à Saint-Dizier. Le mis en cause a donné des cours de langue arabe à la mosquée El-Fath de Saint-Dizier. Avant de mettre un terme à cette collaboration plus d’un an avant son interpellation. Sid Ahmed Ghlam a changé. « Gentil », « influençable », Sid Ahmed Ghlam s’est radicalisé. « Il s’est fait piéger ! »

Dimanche 26 avril 2015, trois personnes résidant en banlieue parisienne sont placées en garde à vue. L’ADN d’un de ces hommes, âgé de 33 ans, a été retrouvé dans le véhicule utilisé par Sid Ahmed Ghlam. Une chose est sûre. Sid Ahmed Ghlam n’a pas agi seul. Le jeune homme a profité de différents soutiens. Le procureur Molins en convient. « Le suspect est passé à l’acte à la suite d’instructions données vraisemblablement de Syrie. (…) Sid Ahmed Ghlam a agi en bénéficiant d’une aide qui s’est traduite par la fourniture de véhicules et d’armement ».

Le 19 juin 2015, le Bragard fait état de la présence d’un deuxième individu à ses côtés. Concédant avoir pris place dans le véhicule d’Aurélie Châtelain comme en atteste la présence de son ADN, Sid Ahmed Ghlam réfute sa responsabilité dans la mort d’Aurélie Châtelain. Le complice du Bragard voulait dérober un véhicule. Cet homme aurait alors accidentellement tué Aurélie Châtelain avant de s’enfuir. Le Bragard affirme s’être par la suite volontairement blessé à une jambe à l’aide d’une arme à feu afin de mettre un terme au projet d’attentat. La version présentée par Sid Ahmed Ghlam trouvera écho dans des déclarations de l’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic.

Sid Ahmed Ghlam était « endoctriné » et « téléguidé », répète Me Benoit, conseil du mis en cause. Un numéro de l’émission “Complément d’enquête” apporte des précisions. Réfugié en Syrie, un certain Abdelnasser Benyoucef, un vétéran jihad plus connu sous l’alias d’Abou Montana, originaire de Villepinte, aurait donné des instructions précises à Sid Ahmed Ghlam. Des consignes lui auraient également été données à l’occasion d’un voyage en Turquie. Ancien membre du Groupe islamique armé (GIA), Samir Nouad est aussi dans le viseur des enquêteurs.

Qui est le complice évoqué par le suspect ? Cet homme serait, selon Sid Ahmed Ghlam, Samy Animour, un des auteurs de l’attentat du Bataclan. Problème… Samy Amimour est mort dans cet attentat.

Ouvert, ce lundi, à Paris, devant la cour d’assises spéciale, ce procès devrait durer un mois. Sid Ahmed Ghlam encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Incarcéré depuis près de cinq ans, le Bragard ne sera pas seul dans le box des accusés. « Une petite dizaine personnes » sont renvoyées devant la cour d’Assises spéciale. Notamment des personnes ayant fourni un appui logistique. Certains seront présents. Morts ou vivants, d’autres sont toujours recherchés.

T. Bo.

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