Dans tous les sens – L’édito de Christophe Bonnefoy
On vit vraiment une époque formidable. Enfin… on aimerait pouvoir le croire. Extraordinaire, plutôt. Dans son sens premier : qui sort de l’ordinaire. On vit une époque où des politiques en viennent à signer une tribune sans l’avoir lue. Sans, donc, savoir dans le détail ce qu’elle défend, mais surtout, avec quels arguments. Et même sans prendre la peine de regarder qui en sont les auteurs. Mais c’est sûr, il faut en être. Il faut absolument lutter contre l’islamophobie. Et en l’occurrence, le combat est plus que louable. Tout comme on doit lutter contre toutes les autres formes de stigmatisation, de discrimination. Mais pas n’importe comment.
Ainsi, les mêmes politiques se ravisent. Ils n’iront pas à une manifestation qui, de vertueuse, est soudain devenue honteuse. Qui, d’un combat contre l’islamophobie, donc, pourrait à l’inverse ressembler à une espèce de tentative de prosélytisme. Mais, comme ils n’ont toujours pas lu la fameuse tribune et qu’ils ont l’impression d’être pris comme des enfants la main dans le sac, ils expliquent un peu embêtés, et pourtant on ne peut plus sérieusement qu’ils ont ce jour-là des obligations familiales, qu’ils ont pris d’autres engagements… « J’peux pas, j’ai piscine », pourrions-nous dire pour plaisanter. Sauf que la situation n’a rien de drôle.
Ce qui représente une vraie interrogation sociétale est détourné de son objet. La laïcité, le voile, la maîtrise de l’immigration sont en partie utilisés dans un unique objectif : électoral, on s’en doute. On en a encore eu la preuve hier avec la passe d’armes entre Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon. Entre le RN et LFI. Au-delà de la manifestation qui doit se tenir aujourd’hui, voilà qui augure encore dans un proche avenir de moments “extra-ordinaires”. Et pas toujours glorieux.