Le sens de l’essentiel – L’édito de Christophe Bonnefoy
L’attente était hier insoutenable. Le suspense haletant. Pendant que nous, Français, en étions encore à nous demander si des manifestants avaient attaqué un hôpital le 1er mai ou s’ils n’avaient fait que se protéger de la police – le monde à l’envers – ; alors que chacun s’interrogeait ce dimanche sur l’avenir d’un mouvement des Gilets jaunes qui cherche un second souffle depuis des semaines ; et en attendant un 26 mai qui risque bien de confirmer que l’abstention réalise des scores plus élevés que les partis en lice… la Grande-Bretagne ne s’émeut même pas pour le Brexit – encore moins pour notre pouvoir d’achat, évidemment – mais pour un événement autrement plus important que les coups de blues qui viennent casser le moral des Européens.
Est-il né, le divin enfant du prince Harry et de Meghan Markle ? Les bookmakers sont au travail. Et pour le coup, les questions existentielles se recentrent chez nos voisins d’outre-Manche sur la couleur du gilet. Pas le jaune, bien sûr. Mais bleu ? Rose ? Garçon ? Fille ? Monde tellement bizarre que celui dans lequel nous vivons. Et perception de l’essentiel qui flirte bien plus souvent aujourd’hui avec la dictature du buzz, donc de l’accessoire, qu’avec le besoin – nécessaire – de réfléchir, de construire, de reconstruire même.
Certes, la Grande-Bretagne n’est pas la France. Mais tout de même. La comparaison, -hasardeuse ? – entre ce stress prénatal et nos dépressions post-17 novembre pourrait mener à une conclusion toute simple. Les temps sont durs. Alors les sujets de Sa Majesté ont sans doute besoin, parfois, de se raccrocher à ces petites choses, un peu plus légères, qui rendent le quotidien, sinon plus drôle, en tout cas plus acceptable. Tout comme nous, de ce côté du tunnel.