Au rapport – L’édito de Patrice Chabanet
Le plus difficile n’aura pas été de lancer le Grand débat. Il a rencontré un succès certain. Ce sera d’en sortir, en réduisant l’écart entre les revendications exprimées et les réponses qu’entend y apporter l’exécutif. Et là, la partie est loin d’être gagnée. On observera avec intérêt comment les doléances des participants – 1,5 million de Français – ont été classées et hiérarchisées. Dès aujourd’hui où seront présentés les résumés des contributions et demain, avec l’intervention du Premier ministre à l’Assemblée nationale, les premières flèches vont être tirées. Par ceux qui ont toujours considéré cette grande consultation comme une « mascarade ». Par ceux qui ne voient dans cet exercice qu’une vaste « manipulation » pour détourner l’opinion publique du mouvement des Gilets jaunes. Ou tout simplement par ceux qui n’y croient pas, ce qui est le cas de deux Français sur trois, si l’on s’en tient aux derniers sondages.
Qu’on le veuille ou non, et malgré l’ampleur du dépouillement et, donc, le risque d’imperfection, on saura maintenant quelles sont les priorités des Français. La question fiscale paraît être en pole position. Mais quid du pouvoir d’achat, de la fracture territoriale, de la transition écologique, de l’immigration, de la réduction du nombre de parlementaires ou…de la vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires ?
Cette première phase fera apparaître forcément des contradictions dans les revendications. Les Français n’ont pas tous les mêmes intérêts. Comment pourrait-il en être autrement dans la restitution de ce méga sondage ? Mais la tâche la plus rude reviendra, dans quelques jours, au chef de l’Etat. Il lui faudra trier dans cette masse de doléances, c’est-à-dire mécontenter ceux qui n’auront pas satisfaction. Ils seront nombreux, puisque les marges de manœuvre économiques sont plutôt minces. A moins qu’il ne sorte de sa manche une mesure spectaculaire. Tout est possible dans une période placée sous le signe de l’imprévisible.