Dépendance mortelle – L’édito de Patrice Chabanet
Cinq morts dans un Ehpad de la région de Toulouse, après une intoxication alimentaire présumée, ce n’est plus un accident. Cela devient une affaire. On peut le comprendre. L’enquête nous dira rapidement ce qui a provoqué le drame. Le hachis incriminé ne s’est pas transformé en poison fatal tout seul. Il y a eu forcément une défaillance humaine quelque part dans la chaîne de fabrication du plat. Ingrédients douteux ou mal conservés ? Chaîne du froid rompue ? Défaillances dans la conservation ? Problèmes d’hygiène ? Le parquet de Toulouse a d’ailleurs ouvert une enquête pour « homicides involontaires et blessures involontaires ».
La colère des familles rencontre l’émotion soulevée dans le pays par cette tragédie. Les personnes qui prennent résidence dans les Ehpad sont souvent en grandes difficultés liées à l’âge et au manque de mobilité. Elles ou leurs familles ont choisi ce type d’établissement pour les préserver des dangers et des accidents auxquels elles sont exposées quand elles vivent seules. Ou pour leur apporter une certaine douceur de vivre, tout simplement. Or voilà qu’une lourde défaillance dans le système de restauration peut leur apporter la mort.
Il ne faut pas généraliser, bien sûr. Mais l’affaire de Lherm où s’est produit le drame braque à nouveau le projecteur sur la question de la dépendance dans notre pays. On sait déjà que les projections démographiques sont impressionnantes. En 2050, la France comptera 15 millions d’habitants de plus de 85 ans, le triple par rapport à aujourd’hui. Plus de deux millions d’entre eux seront dépendants (un million actuellement). C’est le grand défi des prochaines décennies. Le coût économique des efforts à consentir est évident. Mais l’accompagnement de nos aînés ne saurait se réduire à l’utilisation d’une calculette. C’est un problème de société. Or force est de constater que dans les pays du Nord l’accompagnement des personnes âgées est beaucoup plus intégré dans les têtes. Donc plus de moyens. Donc plus humain.