Banalisation – L’édito de Patrice Chabanet
Moins de participation, mais même détermination. C’est ce qui caractérise les manifs des Gilets jaunes depuis quelques semaines maintenant. Chaque camp peut en tirer satisfaction. Le gouvernement y voit assurément l’effet corrosif du phénomène d’usure. Les contestataires, eux, affichent leur fierté d’avoir installé dans le paysage français une fronde à durée indéterminée. Mais, avec cette banalisation de la contestation, les deux camps laissent aussi des plumes. L’exécutif est accusé par les oppositions d’être incapable de faire rentrer dans son lit la rivière de la révolte. Les Gilets jaunes, de leur côté, commencent à être lâchés par une opinion publique qui exige désormais, majoritairement, l’arrêt des manifestations rituelles du samedi. L’impact des violences a laissé des traces.
Samedi prochain ? Certaines voix du mouvement annoncent une mobilisation massive et promettent de faire du mois de mars un feu d’artifices de la contestation. A voir. Il est sûr que, tant qu’on ne connaîtra pas les retombées concrètes du grand débat national, le rituel du samedi après-midi se poursuivra. Pour le moment, Emmanuel Macron occupe le terrain médiatique, et pas seulement le samedi… Ses prestations, devant des publics chaque fois différents, ont fait remonter sa cote de popularité. Mais le défi qu’il doit relever dépasse largement les revendications posées par les seuls Gilets jaunes. Il est ailleurs : trouver la martingale qui pourrait lui permettre de répondre à des milliers de doléances souvent contradictoires, et cela dans un temps très court. Le passage à l’acte risque d’être douloureux. La fracturation du pays est devenue telle qu’intellectuellement on a peine à imaginer un embryon de consensus sur les mesures et les projets qui seront annoncés. Le chef de l’Etat sait qu’il devra annoncer des solutions spectaculaires. Mais il est sans doute conscient qu’il en faudra beaucoup plus pour calmer les ardeurs des plus irréductibles des Gilets jaunes.