L’art de froisser – L’édito de Christophe Bonnefoy
Stratégie délibérée ou tentation permanente de la petite phrase qu’il vaudrait pourtant mieux éviter de prononcer, Emmanuel Macron a l’art de faire réagir. D’attiser les colères, en l’occurrence. Il lui avait suffi de parler de pognon de dingue ou de l’hypothétique rue à traverser pour trouver du travail, et voilà que la parole présidentielle avait aussitôt été interprétée comme une provocation. En tout cas aux yeux de ceux dont la fonction principale – pour dire les choses de manière un peu ironique – serait semble-t-il de coûter beaucoup à l’Etat ou de ne vouloir jamais faire l’effort d’entrer ou de revenir sur le marché du travail. Sous-entendu n’auraient qu’un but dans l’existence : profiter du système. Sacrés Gaulois !
Voilà pour les petits mots qui ont – déjà d’une certaine manière – marqué ce quinquennat. Il y en aura d’autres. Car le Salon de l’agriculture débute à peine. Et on ne peut pas dire que le monde paysan soit rayonnant. Certes, la grande fête doit en rester une. Elle attire chaque année des centaines de milliers de visiteurs. Mais les doléances sont nombreuses. Et qui sait si le président de la République ne sera pas tenté, là aussi, de répondre à une certaine détresse rurale par une nouvelle banderille…
Comme celle qui a fait bondir les partenaires sociaux mercredi soir. Emmanuel Macron leur reproche, ni plus ni moins, d’avoir fait capoter les négociations sur l’assurance-chômage. Et en profite, par la même occasion, pour reprendre la main sur le sujet.
Une manière de dire, de façon détournée, entre autres que la parole laissée aux Français à l’occasion du Grand débat connaîtra la même destinée ? « On vous laisse vous exprimer… mais finalement c’est le gouvernement qui aura le dernier mot » ?