Double enjeu – L’édito de Christophe Bonnefoy
L’affaire Benalla – en tout cas ses développements – est à double enjeu. Les agissements de l’ex-collaborateur d’Emmanuel Macron devront être disséqués par la Justice. C’est en cours. La commission du Sénat, elle, n’a pas tant à s’intéresser aux actes mêmes de l’ancien garde du corps, qu’à la gestion par l’Etat de ses franchissements de ligne blanche. Un enjeu judiciaire, donc. Un enjeu politique, évidemment.
Mis à nouveau en examen vendredi pour l’usage abusif de ses passeports diplomatiques après son éviction de l’Elysée, Alexandre Benalla risque bien, aujourd’hui, de se retrancher derrière le secret de l’instruction. La commission d’enquête sénatoriale, qui a sans doute une tonne de questions à lui poser, ne peut pas espérer obtenir de réponses sur les faits précis. Son rôle n’est ainsi pas celui des policiers. Elle n’est obligée de se concentrer que sur les dysfonctionnements d’un système qui a laissé Benalla transgresser impunément les règles. Elle n’est pas là pour se croire dans un commissariat, mais pour chercher à comprendre pourquoi et comment il a pu fauter. Qui n’a pas vu, n’a pas voulu voir ou n’a pas pu dire stop. C’est toute la difficulté. Car pour répondre aux questions politiques, les membres de la commission doivent forcément s’appuyer, indirectement, sur ce qui relève du judiciaire. Autrement dit, évoquer, même à demi-mots, ce qu’ils ne peuvent évoquer.
On risque donc, ce soir, sauf si Benalla était pris d’une subite envie de parler – au point de ne plus pouvoir s’arrêter – de ne pas en savoir beaucoup plus que ce qu’on sait déjà. Et encore, même s’il en arrivait à révéler ce qu’il dit savoir, ses allégations resteraient encore à vérifier. L’affaire Benalla est loin d’être close.